
Pouvez-vous boire sereinement l’eau du robinet chez vous ? La carte interactive Dans mon eau, développée par Générations futures et Data For Good, permet de savoir quels polluants ont contaminé votre eau potable. Un outil inédit.
Pollution aux PFAS, aux pesticides, au gaz toxique… Face aux multiples alertes concernant l’eau du robinet, vous pouvez dorénavant utiliser le site Dans mon eau. Développé par l’ONG Générations futures et Data For Good, cet outil novateur permet de savoir précisément quels polluants contaminent, ou non, votre eau courante.
Le principe est simple : une carte interactive permet aux internautes de rechercher, via leur adresse, quel est l’état de leur eau potable. Cinq types de polluants sont recherchés : les pesticides et métabolites de pesticides (tous les pesticides sont recherchés, soit environ 300 substances), les PFAS (des polluants éternels), le chlorure de vinyle monomère (CVM) [1], les perchlorates [2] et les nitrates. L’utilisateur a accès aux analyses mensuelles ainsi qu’à celles des années passées.
Un outil basé sur les données des ARS (...)
Le site Dans mon eau se base sur les données de toutes les agences régionales de santé (ARS). « Elles sont difficilement compréhensibles pour le citoyen lambda, c’est pourquoi nous avons voulu les rendre accessibles à travers cet outil », explique à Reporterre Nadine Lauverjat, déléguée générale de Générations futures.
L’idée est de fournir aux citoyens une base d’information à jour, objective et fiable sur l’eau qu’ils boivent. Les habitants découvrent en effet bien souvent après coup que leur eau est polluée (...)
« Grâce à Dans mon eau, ces défaillances dans l’information du public ne se reproduiront plus. Nous serons capables d’identifier ces situations très rapidement, au plus tard un mois après la publication de résultats inquiétants », explique Pauline Cervan, toxicologue chez Générations futures » (...)
Un rapide coup d’œil à la carte permet de se rendre compte que certains secteurs sont plus touchés que d’autres en France, notamment le Nord et la Picardie, où plusieurs problématiques se combinent, entre les pesticides, les nitrates, et les perchlorates, issus de la dégradation des obus pendant la guerre. Le sud et le pourtour méditerranéen sont davantage touchés par la problématique des PFAS, liés aux activités industrielles. L’ouest est plutôt concerné par le CVM, en lien avec le non-renouvellement des canalisations en PVC. (...)
Que faire lorsqu’on s’aperçoit que son eau est polluée ? Nadine Lauverjat incite les populations concernées à saisir leurs élus locaux pour tenter d’obtenir une réponse collective, plutôt que de se tourner vers les « solutions de bouts de tuyaux » : « Certaines, comme l’osmoseur inverse [qui filtre uniquement les molécules d’eau], peuvent être efficaces à court terme ou pour des populations vulnérables, comme les femmes enceintes et les jeunes enfants. Mais cela ne permet pas d’agir sur les sources de pollution. »
Elle met aussi en garde contre les « arnaques » et autres fausses solutions, comme le charbon actif et les perles de céramique qui ne filtrent pas l’essentiel des polluants. (...)
Toutefois, les situations d’extrême pollution sont assez rares, et seules 3 % des unités de distribution de l’eau [3] présentent une eau déconseillée à la consommation pour tout ou une partie de la population, selon Générations futures.
« Dans la globalité, l’eau du robinet en France est de bonne qualité », confirme la déléguée générale de l’ONG. La carte devrait donc permettre de rassurer celles et ceux qui auraient tendance à se tourner vers l’eau en bouteille, par crainte de la contamination. (...)
« Cette carte est une super initiative, mais elle reste assez lacunaire, notamment sur la question du CVM », observe Gaspard Lemaire, chercheur et lanceur d’alerte sur ce type de pollution de l’eau potable. Les cas de contamination au CVM ont en effet été sous-estimés, les données remontées par les ARS et le ministère de la Santé étant incomplètes. (...)
Générations futures et Data For Good sont conscientes de ces lacunes liées aux remontées de données aléatoires. « Certaines situations vont en effet paraître bizarres aux habitants sur place, mais dans ces cas précis, nous pourrons remettre la carte à jour manuellement au fur et à mesure que nous obtiendrons les données officielles, s’engage François Veillerette, porte-parole de Générations futures. On ne pourra pas laisser perdurer un écart aussi important avec la réalité. »