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RFI
Brésil : à la COP30, un accord adopté en deçà des espérances
#COP30 #urgenceclimatique
Article mis en ligne le 23 novembre 2025

Les négociations sur le climat de la COP30 au Brésil ont débouché sur un accord adopté en séance plénière, samedi 22 novembre. Toutefois, à la surprise générale, la session a été brièvement suspendue après adoption formelle des différents textes. A l’heure actuelle, les 197 États sont parvenues à trouver un équilibre entre les mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et le financement de la lutte contre le changement climatique. L’Union européenne se dit « déçue » de « cette COP qui est la manifestation d’une nouvelle réalité géopolitique ». Pour la France, c’est « la COP des Brics ».

Loin d’être assuré la veille au soir, un accord a fini par être trouvé in extremis et adopté lors d’une séance plénière (avec l’ensemble des États). Il reflète l’équilibre... des profondes tensions et divergences entre pays et blocs d’États.

Mais comment qualifier cette COP ? Réussite, succès, bilan en demi-teinte ? Tout dépend des points de vue, sur le fond comme sur la forme, tant jusqu’aux dernières heures, cette COP30 fut marquée par les incidents. La signature d’un accord, obtenu aux forceps, suffit-elle à faire « gagner » le multilatéralisme, comme l’a proclamé le président Lula depuis le G20 ? Rien n’est moins sûr, tant il a été ébranlé durant ces négociations.

« Nous n’allons pas cacher que nous aurions préféré davantage, et plus d’ambition sur tout », a reconnu le commissaire européen chargé du Climat, Wopke Hoekstra à la presse. Mais « nous devons le soutenir, car, au moins, il nous emmène dans la bonne direction ».

Ed Miliband, ministre britannique de l’Énergie qui était présent aux négociations, voit, lui, dans cette issue « un pas en avant ». « Plus de 190 pays ont réaffirmé leur engagement envers l’accord de Paris », a-t-il relevé à Belém. « C’est important dans le contexte du retrait des États-Unis de l’Accord de Paris. Certains ont évoqué un effet domino, mais cela ne s’est pas produit, et c’est significatif ».
Une présidence chaotique en deuxième partie

Les critiques de la méthode brésilienne de conduite des négociations sont allées crescendo durant toute la deuxième semaine. « Ce n’est pas une COP de la vérité, ce n’est pas une COP de la transparence », a martelé la ministre française Monique Barbut, avant d’entrer en séance plénière.

ONG de la société civile, y compris brésiliennes, ont usé du même vocabulaire sur ce point. « Pendant deux semaines, nous avons parlé d’une “COP de la vérité”. Et la vérité n’est pas belle : le multilatéralisme est en détresse et la diplomatie qui a été menée essentiellement derrière des portes closes n’a pas permis de renforcer la confiance dans le processus de la COP. Nous avions besoin de plus de transparence, mais aussi de plus d’honnêteté », a réagi Gaïa Fèbvre, chargée des politiques internationales au Réseau Action Climat France.

Une présidence de COP mise en difficulté d’une séance de clôture chaotique, ponctuée d’objections relatives à des points de procédure. Le président Do Lago, pourtant loué avant la COP pour son expérience de diplomate, a pu compter sur le soutien de la représentante indienne qui, au nom de ses alliés, l’a remercié : « Nous saluons les efforts remarquables déployés par l’équipe de la présidence, qui a notamment passé de nombreuses nuits blanches à travailler pour que nous repartions de Belém avec quelque chose de significatif. »
L’Union européenne cède sur les fossiles face aux Brics

Une nuit de tractations en plus n’y aura rien changé : le texte final du Mutirão ne contient pas de mention des énergies fossiles. L’accord reste donc faible aux yeux du camp d’une plus grande exigence dans les efforts de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Et ce malgré une puissante offensive de la part de 80 pays qui ont formé une coalition en faveur d’une feuille de route pour amener les États à abandonner progressivement l’usage du pétrole, du gaz et du charbon, comme le requiert l’accord trouvé à Dubaï il y a deux ans.

Encore hier pour l’Union européenne, la mention des énergies fossiles était une condition sine qua non. Bruxelles, par la voix de son Commissaire européen au climat Wopke Hoekstra, dit avoir cédé pour sauver le multilatéralisme. Les Brésiliens ont proposé de lancer un processus parallèle au cadre de la COP pour reprendre cette feuille de route. Une même initiative volontaire concernera une feuille de route de la déforestation. (...)

« Nous étions à la croisée des chemins : soit emprunter une voie correctement financée pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, soit foncer droit vers une catastrophe climatique. Or, si de nombreux gouvernements sont prêts à agir, une puissante minorité s’y oppose », a déploré Carolina Pasquali, directrice générale de Greenpeace Brésil. (...)

Au total, les pays développés ne se sont pas engagés à augmenter l’enveloppe globale de leurs financements climatiques, soit un horizon de 300 milliards de dollars par an d’ici à 2035, qui avait été acté à la COP29. Tout effort sur l’adaptation se fera à l’intérieur de cette enveloppe, le reste étant généralement des prêts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le résultat satisfait toutefois l’Alliance des 44 Petits États insulaires,

La Chine, de son côté, obtient la mention du commerce dans un texte climatique. Pékin, qui mène la fronde de plusieurs pays émergents contre les taxes carbone aux frontières de l’Union européenne, en avait fait sa priorité avec d’autres pays exportateurs. Mais les Vingt-Sept, visés par cette offensive diplomatique, n’ont cédé à aucun assouplissement, a confirmé la ministre française à RFI. « Je suis heureux du résultat », a confié à l’AFP le chef de la délégation chinoise à la COP30, Li Gao. « Nous avons accompli ce succès dans une situation très difficile, et cela montre donc que la communauté internationale veut faire preuve de solidarité et réalise des efforts communs pour répondre au changement climatique. »

Parmi les points positifs, le Réseau Action Climat met l’accent sur la mention d’un Mécanisme de transition juste, qui était l’une des revendications de cette vaste coalition d’ONG environnementale. Pour Gaïa Fèbvre, « c’est une immense victoire pour les travailleurs et travailleuses, les jeunes, les femmes ou encore toutes les organisations de la société civile qui sont venues à la COP exiger un cadre garantissant que l’action climatique protège aussi les emplois et améliore la vie des populations. »