
En Espagne, les cas de jeunes migrants se disant mineurs enfermés dans les prisons du pays pour avoir piloté des canots se multiplient, à mesure que les arrivées irrégulières augmentent. Les adultes, eux aussi, subissent le même sort. Comme en Grèce et au Royaume-Uni, deux États qui incarcèrent également des exilés vus à la barre d’un canot, les associations et les militants espagnols estiment que le gouvernement se trompe de cible. (...)
les jeunes étrangers seraient-ils de plus en plus nombreux à remplir les prisons espagnoles ? Difficile à affirmer en raison du manque de données sur le sujet, l’enfermement des mineurs étant interdit par la loi. Mais pour Daniel Arencibia, avocat en droit des étrangers, les affaires de ce type se multiplient. (...)
Il dit observer ces derniers mois une hausse des cas et regrette "beaucoup d’erreurs pour déterminer l’âge" d’un migrant. Cette recrudescence des emprisonnements s’explique, selon lui, par l’augmentation du nombre de mineurs débarqués en Espagne. "En 2020, il y avait moins de 400 mineurs aux Canaries. Aujourd’hui, ils sont plus de 5 000", précise l’avocat. (...)
Des peines différentes selon les provinces espagnoles (...)
"Aux Baléares, ils sont condamnés à deux ans de prison, et aux Canaries à trois voire cinq ans", affirme l’avocat dans une interview accordée au média local Diario de Canarias.
Pour avoir conduit une pirogue, et être poursuivi en tant que passeur, les exilés encourent jusqu’à huit ans de prison en Espagne. Une circulaire stipule cependant que dans le cas où la personne cherche également à obtenir une protection, une circonstance atténuante peut être appliquée et permet de réduire la peine.
Daniel Arencibia a également découvert que le jugement pouvait être plus clément si le migrant renonce à son procès et se déclare donc coupable : dans ce cas, le Parquet réclame trois années de prison, en vertu de la circulaire évoquée précédemment. Dans le cas inverse, il demande sept ans d’emprisonnement. "Dans la province de Las Palmas [sur l’île de Grande Canarie, ndlr], 91% des accusés ont signé le document et accepte la peine de trois ans", renonçant à faire reconnaitre leur innocence.
Rien d’étonnant pour l’avocat car, selon lui, les exilés n’ont d’autres choix : "Le migrant ne comprend pas la langue, a peur et on lui dit : ‘Si vous ne signez pas ce papier, vous ferez sept ans de prison au lieu de trois’", résume-t-il.
Comme en Grèce et au Royaume-Uni, deux États qui incarcèrent aussi des exilés vus à la barre d’un canot, les associations et les militants espagnols estiment que le gouvernement se trompe de cible. (...)