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Fini la voiture individuelle ! Ces habitants créent leur système d’autopartage
#autopartage #Blois #collectifcitoyen #CITIZ
Article mis en ligne le 26 mai 2025
dernière modification le 22 mai 2025

À Blois, un collectif citoyen a mis sur pied un service d’autopartage. Une mise en commun économique pour ses usagers, qui permet de réduire le nombre de voitures en ville.

Depuis dix mois, deux hybrides en autopartage arpentent ainsi les rues de la cité du Loir-et-Cher. Le principe est simple : les habitants se créent un compte en ligne d’où ils peuvent réserver l’une des autos. Dans le véhicule, un boîtier connecté enregistre les kilomètres parcourus et la durée, qui seront ensuite facturés. « C’est simple et fluide », sourit Hélène. (...)

Par chance, la métropole organisait alors des ateliers de réflexion sur la sobriété. Avec d’autres habitants, le projet d’autopartage a alors émergé. « On a organisé une première conférence sur le sujet, et on s’est retrouvé à une centaine de personnes, poursuit la quadragénaire, employée à la région Centre. On n’avait plus le choix, il fallait y aller ! »
Une Toyota et une Citiz en partage

Une dizaine de motivés s’est ensuite penchée les solutions possibles. Fallait-il acheter des véhicules neufs ? Comment faire pour l’assurance ? Quid du partage des clés ? Très vite, le collectif s’est tourné vers Citiz, un réseau national regroupant des coopératives d’autopartage. « On voulait que ce soit facile d’accès et d’usage, explique Hélène. Là ils s’occupaient de tout : le contrat d’assurance, l’assistance, et l’entretien. »

Du côté de Citiz, l’énergie citoyenne les a convaincus de se lancer. « On est davantage habitués à s’implanter dans des villes de plus de 100 000 habitants, où la rentabilité est plus vite atteinte [1], explique Pierre Martin-Paquet, en charge du développement. S’il n’y avait pas eu cette volonté citoyenne, on y aurait réfléchi à deux fois. » (...)

Les Blésois ont ainsi avancé l’argent pour la mise en place du service, et trouvé une première voiture — celle d’une des membres du collectif — à se partager. Et en juillet 2024, la Toyota estampillée Citiz déroulait ses premiers kilomètres sur les bords de Loire, avant l’arrivée, en février, d’un second tacot.
Éviter d’acheter de nouvelles voitures

Une petite réussite : depuis janvier, elles affichent en cumulé 6 630 km au compteur, et 74 réservations. Surtout, elles ont permis aux utilisateurs comme François-Joseph de « ne pas acquérir de nouvelle voiture ». Cet ancien conseiller en informatique, en cours de reconversion agricole, la prend trois fois par mois, notamment « pour se rendre sur des lieux de formation ». Pour d’autres, les Citiz ont remplacé la seconde voiture, bien souvent indispensable pour les familles blésoises. (...)

Un constat corroboré par les chiffres : selon l’Ademe, « une voiture en autopartage remplace cinq à huit voitures personnelles, supprime entre 10 000 et 19 000 km en véhicules personnels par an et libère 0,9 à 3 places de stationnement en voirie ». (...)

« Une voiture partagée de notre réseau, c’est 10 tonnes de CO₂ évitée chaque année » (...)

Car l’autopartage entraîne un changement des comportements, observent les experts. « Les gens qui s’y mettent réduisent de 45 % leurs trajets en voiture, au profit de la marche ou du vélo », précise le représentant. À l’inverse, « quand on a les clés de la voiture toujours chez soi, c’est vite une solution de facilité », abonde François-Joseph, qui reconnaît pédaler et marcher davantage depuis six mois (...)

Le bénéfice est aussi économique. Alors qu’une voiture individuelle coûte en moyenne 6 000 euros par an, l’autopartage revient entre 1 000 et 2 000 euros annuels, selon Citiz. À Blois, outre l’abonnement mensuel de 16 euros, il faut compter 0,42 euro par kilomètre et 3 euros de l’heure.

Un système efficace, qui gagne du terrain. Citiz compte aujourd’hui 100 000 conducteurs, dans 270 villes — autant d’antennes où les adhérents peuvent louer une auto. Une belle croissance, pour un projet né au tournant des années 2000 à Strasbourg. (...)

« Le modèle coopératif s’est vite imposé, indique le porte-parole. Ça permet de garder les utilisateurs au cœur du projet, mais aussi d’aller voir des banquiers pour investir dans une flotte de véhicules. En tant qu’entreprise, on est pris au sérieux. »
L’autopartage, pas assez rentable pour Renault et BMW

Malgré ses vertus, l’autopartage peine à décoller en France. En 2022, d’après l’Ademe, on comptait près de 300 000 conducteurs partageurs actifs. Une goutte d’eau dans l’océan du tout-bagnole. Et plusieurs gros acteurs de l’automobile — Renault, BMW et récemment Europcar — ont renoncé à investir dans ce secteur, pas assez rentable à leur goût. (...)

À Blois, l’enjeu est de « trouver un équilibre économique », explique Hélène. En clair : avoir suffisamment d’utilisateurs pour payer l’entretien et l’assurance des deux autos.

Rallier des professionnels — qui utilisent le service en journée, tandis que les particuliers y ont recours plutôt en soirée et le weekend — mais aussi les collectivités, qui peuvent abonner leurs agents au réseau, voire mettre leur flotte en autopartage. Autant de pistes pour pérenniser le réseau blésois, selon François-Joseph : « Le défi, c’est de toucher des personnes au-delà du cercle des convaincus, dit-il. Il faut leur faire sauter le pas, car essayer l’autopartage, c’est l’adopter ! »