
Le premier anniversaire de l’accession au pouvoir Javier Milei à la présidence de l’Argentine est l’occasion d’une médiatisation suffisamment rare à l’égard d’un chef d’État latino-américain, qu’elle mérite que l’on s’y attarde. Alors que l’Amérique latine est une région structurellement sous investie par les médias [1], ce traitement médiatique dénote un intérêt peu commun dont font preuve les rédactions à l’égard de ses « solutions de choc » néolibérales…
Concédons d’abord que tous les médias ne versent pas dans l’enthousiasme caricatural d’un Charles Consigny ou d’un Olivier Babeau. Le premier, en avril, vantait dans Le Figaro le « travail salutaire » de Milei, et décrétait : « Javier Milei nous montre la voie à suivre. » (28/04)
Le second, quant à lui, enchaîne depuis un an les tweets passionnés, et rassure, sur Europe 1 : « Pour l’instant, la direction est la bonne. » (26/11)
On ne s’étonnera pas non plus de voir Le Point se pâmer devant « l’économiste qui révolutionne l’Argentine » (10/12), Valeurs actuelles se réjouir qu’il ait promis « de supprimer 90% des impôts fédéraux et veut un traité de libre-échange avec les États-Unis » (11/12), ou L’Express s’émouvoir de « ces prouesses économiques que la gauche refuse de voir » (10/12). Sur LCI, c’est Pascal Perri qui tient chronique : « Milei redresse l’Argentine à la tronçonneuse » (11/12).
Au Figaro, enfin, la titraille ne fait pas dans la dentelle : « Beaucoup de chemin reste à accomplir pour sortir totalement le pays de la crise économique abyssale dans laquelle il était plongé. Mais la potion ultralibérale administrée depuis un an par le fantasque président produit déjà des effets. » Un article sobrement intitulé « Javier Milei, ce "Trump de la pampa" qui redresse l’Argentine » (7/12).
« S’inspirer » de Milei ?
Derrière cet engouement idéologique, l’un des angles récurrents dans la presse consiste à envisager la possibilité d’importer les « recettes » de cette « révolution libertarienne » dont parle France Inter ou La Croix (10/12). « De Milei à Trump, le libertarisme est-il la nouvelle doctrine ? » s’interroge ainsi France Culture…
Un angle qui n’est d’ailleurs pas étranger à Valeurs actuelles (12/12) qui, en confiant les colonnes de son édito à Nicolas Lecaussin (directeur de l’Institut de recherches économiques et fiscales (Iref), think tank libéral), salue « l’exemple argentin » et conclue : « et si la France s’en inspirait ? »
À l’instar de 20 Minutes qui, en dépit d’« un premier bilan… mitigé », se demande si « le bûcheron Javier Milei peut devenir une inspiration pour les politiques en France ? ». (...)
On appréciera – ou pas – le trait d’ironie sur le « petit détail » d’une explosion de la pauvreté. (...)
En dehors de certaines critiques plus tranchées, par exemple dans Libération (13/12), L’Humanité (9/12) ou Mediapart (10/12), les médias dominants sont dans un entre-deux, la plupart lui concédant un « bilan mitigé » (BFM-TV, 10/12). (...)