
Le gouvernement britannique a annoncé mardi que les agents de l’immigration allaient utiliser l’intelligence artificielle pour permettre d’évaluer l’âge d’une personne en fonction des traits de son visage. Cette mesure, mise en place en 2026, vise notamment les exilés se déclarant mineurs à leur arrivée au Royaume-Uni.
Lorsque les personnes impliquées dans le processus d’évaluation de l’âge ne sont pas certaines de l’âge d’une personne, ou n’acceptent pas l’âge qu’elle prétend avoir, l’estimation de l’âge facial offre un moyen potentiellement rapide et simple de confronter leurs jugements aux estimations produites par la technologie", a estimé Angela Eagle. (...)
L’IA est déjà utilisée au Royaume-Uni, notamment par des banques ou des sites d’achat en ligne, pour vérifier l’âge des clients.
Erreurs fréquentes dans l’évaluation de l’âge
Actuellement, ce sont les agents de l’immigration et les travailleurs sociaux qui sont chargés de déterminer l’âge d’un migrant arrivant sur le sol britannique. Mais cette évaluation, particulièrement difficile, présente d’importantes lacunes.
Un rapport de l’inspecteur en chef des frontières et de l’immigration, publié le même jour que l’annonce de la ministre, étrille les méthodes des services britanniques dans l’estimation de l’âge d’un exilé. Dans le document, David Bolt regrette que les autorités se basent sur des "caractéristiques physiques génériques" et ne prennent pas assez en compte "la situation individuelle du jeune". (...)
L’inspecteur a pris l’exemple d’un homme arrivé par "small boat" affirmant avoir 17 ans. Le ministère de l’Intérieur avait estimé son âge à 22 ans en s’appuyant sur sa "voix grave", son "visage pleinement développé" et sa "barbe épaisse et noire".
Ces erreurs dans l’évaluation de l’âge peuvent avoir de graves conséquences sur la sécurité des enfants, considérés à tort comme des adultes, qui se retrouvent contraints de partager une chambre avec un adulte.
Risques d’exploitation
D’après un rapport d’une coalition de près de 100 ONG britanniques sorti en début d’année, plus de 250 enfants demandeurs d’asile ont été placés à tort dans des logements pour adultes ou en détention au cours du premier semestre 2024.
Le Conseil des réfugiés, l’un des membres de la coalition, avait alors déploré auprès de The Independent que malgré des "avertissements répétés", de nombreux enfants sont toujours "placés dans des situations dangereuses, avec un risque sérieux d’abus et de négligence". Le directeur général, Enver Solomon, avait pointé "des cas d’exploitation et d’abus qui menacent gravement leur santé mentale". (...)
En janvier 2024, un autre rapport associatif avait fait état d’au moins 1 300 migrants mineurs considérés à tort comme des adultes par les autorités britanniques entre janvier 2022 et juin 2023.
Certains de ces 1 300 mineurs ont été "confrontés à du harcèlement et des abus", selon les auteurs. En 2022, deux enquêtes avaient été ouvertes par la police de Londres après qu’un enfant et un adolescent aient déclaré avoir subi des agressions sexuelles et un viol dans un hôtel utilisé comme centre d’hébergement de migrants. Les deux jeunes auraient été agressés par deux personnes différentes.
En juillet 2023, le Royaume-Uni avait été condamné pour avoir hébergé des mineurs demandeurs d’asile dans des hôtels sur de longues périodes et sans soin, alors que ce mode d’hébergement est censé être restreint à de très courtes périodes.
L’une des conséquences est que de nombreux jeunes disparaissent des radars, parce qu’ils fuient d’eux-mêmes ou tombent sous l’emprise de réseaux. (...)