
Selon les informations de Reporterre, le groupe du milliardaire Rodolphe Saadé, dont les relations avec le pouvoir n’ont cessé de se renforcer depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée, a signé un chèque de 2 millions d’euros pour soutenir le sommet. Dans un curieux document transmis aux journalistes par le ministère de la transition écologique pour leur « recommander » des sujets d’articles en amont de l’événement, le nom de CMA CGM est cité trois fois comme interlocuteur potentiel – « un traitement de faveur unique », souligne à juste titre le site d’information.
Le recours à des sponsors privés lors des grands événements officiels est une équation aussi délicate que politique. L’ancien ministre des affaires étrangères Laurent Fabius en avait fait l’expérience en 2015 au moment de la COP21, en annonçant l’identité des entreprises prêtes à mettre la main au portefeuille pour financer la conférence internationale de Paris sur le climat. Parmi celles-ci, quelques gros pollueurs, comme EDF et Engie. (...)
Face à la colère des ONG climatiques, le ministre avait assuré – sans convaincre – que l’activité de ces partenaires était « compatible avec un haut niveau d’exigence environnementale ». Ce qui n’était pas le cas – à en croire le secrétaire général chargé de l’organisation de la COP21 Pierre Henri Guignard – de Total, écarté des potentiels sponsors. Neuf ans plus tard, le groupe pétrolier renoncera aussi à sponsoriser les Jeux olympiques (JO) 2024 de Paris pour les mêmes raisons.
Les organisateurs de la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc), qui s’ouvre lundi 9 juin à Nice (Alpes-Maritimes), ne se sont même pas embarrassés des apparences. Pour financer ce rendez-vous clé pour Emmanuel Macron – le chef de l’État rêve d’en faire un héritage écologique à la fin de sa présidence –, ils ont eu recours à l’armateur CMA CGM, un des leaders mondiaux de ce marché.
L’un des plus gros pollueurs aussi : d’après l’Organisation maritime internationale (OMI), le transport maritime représente au niveau mondial près de 3 % des émissions de gaz à effet de serre – soit autant que l’aviation. (...)
Selon les informations de Reporterre, le groupe du milliardaire Rodolphe Saadé, dont les relations avec le pouvoir n’ont cessé de se renforcer depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée, a signé un chèque de 2 millions d’euros pour soutenir le sommet. Dans un curieux document transmis aux journalistes par le ministère de la transition écologique pour leur « recommander » des sujets d’articles en amont de l’événement, le nom de CMA CGM est cité trois fois comme interlocuteur potentiel – « un traitement de faveur unique », souligne à juste titre le site d’information.
Un dérapage spectaculaire
L’apport financier du groupe maritime est arrivé au bon moment pour les organisateurs de l’Unoc, dont le budget global a explosé au cours des derniers mois, malgré les alertes de plusieurs ministres et de hauts fonctionnaires. (...)
Les raisons de ce dérapage spectaculaire sont liées à la conception même de l’événement, et à l’entêtement de l’Élysée à vouloir le tenir coûte que coûte dans la ville dirigée par Christian Estrosi. Ce dernier aimerait faire de l’Unoc une vitrine pour sa réélection en 2026. Mais au-delà des ambitions personnelles de l’édile, le choix d’organiser ce sommet dans une municipalité qui a récemment démoli la seule infrastructure capable d’accueillir un tel rendez-vous – le palais Acropolis, qui avait par exemple accueilli le sommet Afrique-France en 2010 – avait suscité d’importants questionnements, jusqu’au plus haut sommet de l’État.
Comme l’avait raconté Mediapart, documents à l’appui, Christian Estrosi a su se montrer particulièrement insistant. Voyant une occasion de faire payer par l’État un nouveau centre des congrès flambant neuf, il s’est démené auprès du président de la République pour obtenir gain de cause, malgré les critiques sur les coûts financiers et environnementaux d’une telle opération.
Les délais de construction étant trop resserrés, l’Unoc sera finalement accueilli dans une structure « semi-temporaire », utilisable quelques années seulement, et montée à toute vitesse par le géant de l’événementiel GL Events, lui aussi proche du pouvoir macroniste. (...)
Mais cette précipitation a aussi sérieusement grevé le budget global de l’événement. (...)
Ces dernières semaines, les organisateurs de la grande « COP de l’océan » d’Emmanuel Macron se sont donc tournés vers le secteur privé afin d’alléger la note de l’État, sans être en mesure de se montrer exigeants quant à la qualité des mécènes. La CMA CGM s’est engouffrée dans la brèche pour mettre en avant, en échange de son chèque de 2 millions d’euros, ses projets controversés dans les « carburants bas-carbone » ou en faveur de la « préservation de la biodiversité marine ». (...)
Comme il en a l’habitude, le groupe de Rodolphe Saadé, qui engrange des superprofits grâce à un avantage fiscal astronomique, et vient de confirmer un programme d’investissement de 20 milliards de dollars aux États-Unis, avance partout où les pouvoirs publics reculent (...)
, le transporteur maritime a progressivement étendu sa toile, finançant à tour de bras des projets associatifs et investissant dans les médias, au point de se rendre incontournable auprès de tous, droite et gauche confondues.
La présence de l’armateur parmi les principaux sponsors du sommet vient allonger la longue liste de questions soulevées par le réseau d’associations Alliance écologique et sociale (AES) des Alpes-Maritimes, qui dénonçait, dès l’automne 2024, « un projet écologique aberrant ». Tout récemment encore, le comité de défense des quartiers du port de Nice et de l’environnement s’est adressé au préfet pour réclamer un contrôle du respect du permis de construire, suspectant un manque de conformité avec l’autorisation d’urbanisme délivrée sous l’avis de l’architecte des bâtiments de France.