
En 2023, StreetPress a révélé les pratiques brutales de José Lison, un huissier de justice sans scrupules mandaté par les bailleurs sociaux de la métropole lilloise. Depuis, le parquet a diligenté une enquête et l’a placé en garde à vue.
Il y a un an, en mars 2023, StreetPress révélait les méthodes brutales de José Lison, un huissier sans scrupules que s’arrachent les bailleurs sociaux du département car il arrive à expulser les plus précaires rapidement à coup de menaces ou d’intimidations. Son cabinet avait même remporté un appel d’offres de LMH, le bailleur social de la Métropole européenne de Lille (59), pour la somme de 735.000 euros. À la suite de ces révélations, « la procureure de la République a ouvert une enquête diligentée des chefs de violation de domicile par dépositaire de l’autorité publique, de manœuvre, menace ou contrainte pour forcer une personne à quitter son lieu d’habitation et de faux en écriture publique », a indiqué le parquet.
Les langues se sont depuis déliées et au moins trois victimes ont déposé plainte contre le commissaire de justice – qui a lui porté plainte contre StreetPress après notre article pour « diffamation ». Le 16 mai dernier, il a été placé en garde à vue et déféré devant le parquet. Il sera jugé le 12 novembre prochain et est en attendant placé sous contrôle judiciaire avec interdiction partielle d’exercice professionnel. « Si la culpabilité de monsieur Lison venait à être reconnue, il s’agirait d’une condamnation qui me paraît inédite. Surtout, elle permettrait aux victimes de pouvoir enfin être reconnues comme telles et entendues dans les souffrances qu’elles expriment en raison des actes dénoncés aux enquêteurs », estime maître Raphaël Ekwalla-Mathieu, l’avocat des victimes. (...)
Expulsée pour une dette de 3 euros et 96 centimes (...)
« Maître Lison m’a dit que soit je quittais les lieux, soit il prenait mes meubles. Cette phrase s’est ajoutée à toute la pression du moment. » En trente minutes, Nora s’est retrouvée à la rue, une seule valise de vêtements en guise d’affaires de survie. Elle perd son travail quelques jours plus tard. La locataire soupire :
« Ils m’ont expulsé pour une dette de 3 euros et 96 centimes. »
Nora accuse Maître Lison d’avoir établi un faux procès-verbal attestant de son départ volontaire. (...)
Le 19 janvier dernier, le tribunal judiciaire de Lille a confirmé le caractère abusif de son expulsion et a condamné le bailleur à lui verser plus de 6.000 euros d’indemnités et de préjudice.
Faux en écriture publique (...)
Un collectif de victimes
En attendant que justice soit faite, les locataires victimes de l’huissier ont décidé d’unir leurs forces pour faire face aux conséquences sociales et psychologiques de l’expulsion. « Ce collectif permet de ne pas être seul et de trouver le courage de faire valoir ses droits », insiste Nora, à l’origine de ce groupe de soutien qui rassemble déjà cinq autres victimes de José Lison.
« Cette expulsion a été un tsunami pour moi, une violence inhumaine. Je suis resté pendant huit mois enfermé, je confondais le jour et la nuit. J’étais démoli », confie Laurent, qui vit depuis son expulsion dans un camping-car, en banlieue lilloise. Il a récemment rejoint le collectif qui l’aide à surmonter cette épreuve (...)