
Le gouvernement britannique s’est félicité vendredi d’un "durcissement" dans les pratiques des forces de l’ordre françaises pour intercepter les migrants tentant d’atteindre le Royaume-Uni via la Manche. Quelques heures plus tôt, des images diffusées par la BBC sur une plage française montraient des forces de l’ordre empêcher le départ d’un "small boat" en lacérant le canot déjà dans l’eau.
Les images font déjà polémique. Vendredi 4 juillet, la chaîne de télévision britannique BBC a diffusé une vidéo tournée sur une plage française, près de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), montrant des gendarmes français intervenir pour empêcher un canot de migrants, déjà dans l’eau, de traverser la Manche. (...)
Sur les images, on voit des dizaines d’exilés - dont des femmes et des enfants - de l’eau jusqu’à la taille, tenter de monter dans un "small boat" alors que les vagues rendent l’embarcation instable. Puis, des forces de l’ordre, observant la scène stationnées sur le sable, enlèvent leur gilet par balle et leur ceinture, et accourent vers le canot, un cutter dans les mains. Les gendarmes lacèrent le bateau pour le mettre hors d’état de naviguer et ordonnent aux exilés de regagner la plage. On entend des personnes crier, certaines craignant d’être écrasées par le poids des autres passagers lorsque le "small boat" s’affaisse. Des exilés viennent même porter secours à des migrants paniqués.
"Sauver les personnes en péril"
Selon la préfecture des Hauts-de-France, vendredi à 8h30, un taxi-boat est venu embarquer des passagers sur la plage de Saint-Etienne-au-Mont (Pas-de-Calais, sur la côte française). L’embarcation transportait déjà 30 personnes "lorsqu’une cinquantaine de migrants (hommes, femmes et enfants) s’est présentée sur la plage", a-t-elle précisé. Six militaires "sont restés en sécurisation lors de l’embarquement, en application des ordres".
Lors de l’embarquement, "les personnes situées à l’eau à l’arrière du ’small boat’ couraient un danger immédiat", a poursuivi la préfecture. "Le bateau, surchargé, s’enfonçait, et des migrants tentaient de monter à l’arrière au risque d’être happés par l’hélice", a par ailleurs rapporté le ministère de l’Intérieur. "Les gendarmes, avec de l’eau jusqu’aux genoux, sont intervenus pour sauver les personnes en péril, tirer le bateau jusqu’à la plage et le neutraliser", s’est-il justifié. (...)
Lors de cette opération, "aucune personne n’a été blessée ou a nécessité une prise en charge par les secours", a rapporté la préfecture.
Du côté de Londres, on se réjouit des nouvelles pratiques des autorités françaises pour stopper les départs de migrants. (...)
"Nous voyons de nouvelles tactiques utilisées pour perturber ces bateaux avant qu’ils ne commencent leur voyage", a poursuivi le porte-parole.
Intercepter les canots en mer
Le Royaume-Uni fait pression sur la France pour que celle-ci modifie la "doctrine" d’intervention des policiers et gendarmes en mer afin de pouvoir intercepter jusqu’à 300 mètres des côtes les taxi-boats. Ces derniers embarquent des migrants directement dans la mer pour éviter les contrôles sur les plages. (...)
Conformément au droit international de la mer, une fois qu’une embarcation navigue, les autorités ne doivent faire que du sauvetage et sont pas supposées intervenir pour intercepter les migrants, afin d’éviter des noyades. (...)
Lors du sommet franco-britannique, qui doit se tenir du mardi 8 au jeudi 10 juillet, le sujet migratoire sera au cœur des débats. Outres les interceptions en mer, Paris et Londres travaillent aussi sur un échange de migrants. Il s’agit d’un projet "pilote", selon plusieurs sources, une expérimentation qui reposerait sur le "principe de un pour un".
Le Royaume-Uni prendrait certains migrants, des "populations fragiles" selon une source française, et en échange renverrait en France des personnes arrivées en bateau. Paris voudrait élargir cet accord à l’Union européenne, pour que les réadmissions soient partagées entre plusieurs pays.
En février, Londres et Paris ont prolongé d’un an jusqu’en 2027 le traité de Sandhurst, le cadre légal entre les deux pays sur les questions migratoires.