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France24
Nucléaire iranien : Moscou et Pékin impuissants face au "snapback" des Européens contre l’Iran ?
#Iran #nucleaire
Article mis en ligne le 13 septembre 2025

Un compte à rebours est enclenché jusqu’au 18 octobre, date d’expiration de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien. La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont décidé d’activer le mécanisme du "snapback", qui réimpose automatiquement les sanctions onusiennes contre Téhéran en cas de manquement. Pékin, Moscou et Téhéran dénoncent une décision illégale et multiplient les manœuvres diplomatiques pour en freiner la mise en œuvre.

"Un outil redoutable", résume le chercheur David Rigoulet-Roze. Le "snapback", mécanisme de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015, permet, en cas de triche iranienne, de ré-imposer ("snapback" en anglais) toutes les mesures punitives, sans craindre un veto d’un autre État.

Ce mécanisme que la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont décidé de déclencher, jeudi 28 août, en raison du non-respect par l’Iran de ses obligations avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et de la question des stocks d’uranium enrichi, ne laisse quasiment aucune chance à Téhéran d’échapper aux sanctions de l’ONU le 18 octobre.

D’ici là, un compte à rebours est lancé pour des négociations de la dernière chance entre Européens et Iraniens.

L’accord de Vienne prévoit un encadrement des activités nucléaires iraniennes en échange d’une levée des sanctions. Ce qui est encore le cas actuellement, et ce jusqu’au 18 octobre, date à laquelle cet accord deviendra caduc.

En 2015, au moment de la signature de l’accord sur le nucléaire iranien, la France, par le biais de son chef de la diplomatie de l’époque, Laurent Fabius, avait jugé le deal défendu par Barack Obama "pas assez contraignant", estimant qu’il "n’offrait pas suffisamment de garanties en cas de non-respect par Téhéran de ses engagements pris dans le cadre de cet accord", raconte David Rigoulet-Roze, rédacteur en chef de la revue Orients Stratégiques. "Alors, il avait fait insérer ce mécanisme inédit dans la résolution 2231. Et c’est probablement aussi pour cette raison que le régime iranien a un grief particulier à l’endroit de la France alors que ce mécanisme se trouve aujourd’hui mobilisé", ajoute le chercheur.
L’échéance du 18 octobre

Ce mécanisme de "snapback", suggéré par la France, arrive lui aussi à échéance le 18 octobre, d’où la décision par les puissances européennes de lancer le processus.

Un choix qui a aussitôt provoqué la colère de Pékin, Moscou et Téhéran. (...)

Le courrier publié par le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araqchi dans un message sur X affirme que la décision prise par la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne (E3) "abuse de l’autorité et des fonctions du Conseil de sécurité des Nations unies". (...)

La Chine et la Russie ont tout intérêt à ce que le rétablissement des sanctions onusiennes contre l’Iran échoue. Celles-ci impliqueraient de nouveaux embargos sur les armes et un contrôle renforcé des exportations de produits pétroliers iraniens. Pékin continue d’acheter du brut iranien en toute discrétion, tandis que Moscou s’appuie sur les drones et missiles fournis par Téhéran pour alimenter sa guerre en Ukraine.

La riposte diplomatique de Pékin et Moscou

Reste alors une question centrale : Pékin et Moscou, en tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et signataires de l’accord de 2015, pourraient-ils empêcher ce mécanisme de s’appliquer ? (...)

l’un des membres du Conseil peut demander une résolution visant à prolonger la levée des sanctions, ce qui revient à annuler le "snapback". C’est ce que viennent de faire Pékin et Moscou, (...)

Mais cette démarche n’a aucune chance de passer car l’adoption de cette résolution nécessiterait une majorité au Conseil de sécurité. Or, les Occidentaux sont contre. Et surtout, cette fois, le texte proposé par la Chine et la Russie peut faire l’objet d’un veto de la part de n’importe lequel des membres permanents.

Pouvoir de nuisance à l’ONU

(...) Les Russes prendront en octobre la présidence tournante du Conseil de sécurité, "ce qui peut leur donner l’occasion de bousculer les ordres du jour et de ralentir certaines procédures" (...)

La réactivation des sanctions onusiennes contre l’Iran nécessite la constitution d’un comité onusien des sanctions. Or, les membres du Conseil, notamment la Russie, pourraient tenter "de contrecarrer la mise en œuvre ou de saper la légitimité des sanctions rétablies en bloquant la nomination d’un président pour ce comité ou en boycottant ses consultations", prévient l’International Crisis Groupe dans une analyse publiée fin août.

"La Russie et la Chine pourraient aussi s’efforcer de contrecarrer les efforts du Secrétaire général Antonio Guterres visant à nommer un nouveau groupe d’experts chargés de surveiller le rétablissement des sanctions en bloquant la sélection d’experts (...)

Autrement dit, si les manœuvres russes et chinoises n’affecteront pas la validité des sanctions rétablies, elles risquent en revanche d’en compliquer la mise en œuvre.