
Non, les Groenlandais ne sont pas favorables à l’annexion de leur île par les États-Unis. Mais la relation actuelle avec le Danemark ne fait pas l’unanimité non plus.
Múte Bourup Egede, le Premier ministre groenlandais, a appelé au calme et à la sérénité après que Donald Trump a refusé d’exclure le recours à la force pour annexer le Groenland. Le président élu américain, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, affirme que le Danemark, auquel l’île est rattachée de manière constitutionnelle, devrait renoncer à l’ensemble de ses droits légaux sur ce territoire.
Sur cette île peuplée par 57.000 habitants, les déclarations du milliardaire républicain n’ont pas été accueillies avec un enthousiasme particulier. Mais attention : cela ne signifie pas que les habitants se satisfont pleinement de la situation politique actuelle. Comme souvent, les choses sont plus compliquées. Le quotidien britannique The Guardian est allé à la rencontre des Groenlandais pour tenter de comprendre ce qu’ils traversent. (...)
Colonie danoise jusqu’en 1953, le Groenland est devenu un territoire autonome, avec la possibilité de revendiquer son indépendance par référendum depuis 2009. Les propos de Donald Trump sur l’achat ou l’annexion de l’île par la force interviennent à un moment où cette question de l’indépendance est particulièrement sensible : le Premier ministre Múte Bourup Egede s’y déclare d’ailleurs favorable. Selon un sondage réalisé par l’Université de Copenhague, 67,7% des adultes groenlandais se prononçaient en 2019 en faveur d’une indépendance complète vis-à-vis du Danemark.
Ole Hjorth, un contrôleur aérien groenlandais de 27 ans, explique au Guardian que le Groenland appartient à ses habitants et qu’il n’est pas à vendre. « Parler d’une éventuelle annexion est terrifiant et ridicule. S’il recourait à la force militaire, cela signifierait une guerre avec le reste de l’OTAN », déclare-t-il. Il juge l’idée de vendre l’île complètement absurde, d’autant plus que les débats autour de l’indépendance se sont intensifiés ces dernières années. « Avec les nombreuses discussions récentes sur un éventuel référendum sur l’indépendance du Groenland, il serait étrange que nous acceptions de nous laisser vendre à un autre pays. » (...)
De l’aveu de nombreux Groenlandais, l’espoir de voir leur île accéder à l’indépendance vis-à-vis du Danemark est de plus en plus vif, dans un contexte marqué par une animosité croissante envers Copenhague. Parallèlement, le sentiment de reconnaissance envers les Américains pour leur rôle durant la Seconde Guerre mondiale n’a jamais été aussi fort. En effet, le Groenland était passé sous le contrôle des États-Unis pendant le conflit, tandis que le Danemark, sous occupation allemande, collaborait avec le Troisième Reich. (...)
On comprend mieux pourquoi certains Groenlandais ont accueilli Donald Trump Jr. avec des casquettes siglées « Make America Great Again » (MAGA), le mardi 7 janvier à Nuuk.
Enfin, la question des ressources naturelles demeure un enjeu majeur de la vie politique groenlandaise. « Je pense qu’en tant que Groenlandais, nous devrions avoir la possibilité d’exploiter et de gérer nos ressources naturelles de manière indépendante avant de chercher à collaborer avec d’autres pays », conclut Frans H. Petersen, un jeune étudiant. Les tensions restent vives et les déclarations de Donald Trump ne risquent pas de les apaiser.