
La plus grande extinction de masse a effacé près de 90 % des espèces de la surface de la Terre il y a environ 250 millions d’années. Mais le grand mystère de cet événement porte sur sa suite : pourquoi le globe est-il resté invivable pendant cinq millions d’années ? Des scientifiques ont peut-être trouvé la solution et elle tient en partie aux forêts tropicales. De quoi nous alerter de leur importance encore à l’heure actuelle.
Petit cours de paléontologie pour qui se demanderait à quoi bon garder un œil sur l’état de santé des forêts tropicales. Leur disparition il y a environ 250 millions d’années a pu avoir des conséquences dramatiques sur le cours de l’histoire de la Terre pendant des millions d’années, selon une étude internationale publiée mercredi 2 juillet par la revue scientifique de référence Nature.
Les chercheurs se sont intéressés à ce qui s’est produit juste après l’un des événements les plus marquants de la vie sur Terre : la troisième grande extinction. C’est la mère de toutes les extinctions de masse – il y en a eu cinq jusqu’à présent – puisqu’elle a provoqué la disparition d’environ 90 % de toutes les formes de vie qui existaient sur terre ou en mer. Du jamais-vu avant ou après. (...)
Il aura fallu attendre environ cinq millions d’années pour un retour à la normale, permettant à la vie d’avoir une chance… de survie. Même les scientifiques habitués à travailler sur des temps longs comme les paléontologues trouvent que, cette fois-ci, la Terre ne s’est vraiment pas pressée. "D’habitude, il faut plutôt des centaines de milliers d’années à un écosystème pour se reformer après un événement comme une extinction de masse", souligne Hana Jurikova, chercheuse à l’École des sciences de la Terre et de l’environnement de l’université de St Andrews, qui a travaillé sur les différentes extinctions de masse.
Ces cinq millions d’années constituent encore aujourd’hui l’un des grands mystères de la paléohistoire, d’après les scientifiques interrogés par France 24. L’étude publiée dans Nature tente d’y répondre en expliquant que la Terre a peiné à se remettre de cette troisième grande extinction de masse parce qu’"une grande partie de la végétation terrestre, et surtout la biomasse tropicale, avait disparu" au cours de cette crise climatique, souligne Bethany Allen.
Sans forêts tropicales, c’est chaud
Sans ces forêts jadis luxuriantes, "le cycle du carbone a été profondément affecté", souligne Yannick Donnadieu, paléoclimatologue au Centre de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement du CNRS, qui a participé à l’étude. "Ces plantes et arbres jouent un rôle d’aspirateurs de CO2 et, sans eux, tout ce dioxyde de carbone rejeté par les éruptions volcaniques est resté dans l’atmosphère, ce qui explique pourquoi les températures très élevées ont persisté aussi longtemps", précise Bethany Allen. (...)
les températures "ont probablement connu une hausse de 10 à 15 °C par rapport à la période avant cette grande extinction". Difficile d’avoir des preuves directes du climat de l’époque, mais "on estime que les températures maximales des océans étaient aux alentours de 42 °C et, sur terre, il faisait environ 50 °C", détaille Bethany Allen.
Conséquence : la surface terrestre a été modifiée en profondeur pendant ces cinq millions d’années. (...)
l’étude "ne répond pas à la question de savoir pourquoi cette végétation a eu tellement de mal à revenir" (...) . C’est l’une des interrogations qui font que les recherches méritent d’être approfondies, reconnaissent les scientifiques interrogés par France 24. (...)
Une autre question à laquelle l’étude n’apporte pas de réponse est de savoir si ces leçons du passé nous éclairent sur ce qui nous attendrait si les forêts tropicales venaient à disparaître. "Ces travaux apportent la preuve que la disparition de cette végétation est un point de bascule climatique", assure Benjamin Mills.
Ensuite, il ne fait guère de doute que "la perturbation climatique actuelle se produit bien plus rapidement qu’auparavant [lors des extinctions de masse, NDLR] et que cela va forcément avoir un effet sur ces plantes", assure Yannick Donnadieu. Donc si ces "puits à carbone naturels" viennent à disparaître comme il y a 250 millions d’années, est-ce que cela veut dire la Terre va de nouveau se transformer en monde hostile à la vie pendant des millions d’années ?
"La disparition de ces écosystèmes aurait des conséquences inimaginables pour la Terre, mais il est difficile de faire une comparaison entre aujourd’hui et il y a 252 millions d’années, car les conditions et l’environnement ne sont pas les mêmes", assure Hana Jurikova. (...)
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