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Mediapart
Quand le Kremlin fait de son pire
#guerreenukraine #Poutine #Russie #repression #extremedroite
Article mis en ligne le 1er janvier 2024
dernière modification le 31 décembre 2023

La Russie a lancé, vendredi 29 décembre, une vaste série de frappes sur plusieurs villes ukrainiennes, dont la capitale Kyiv. Le pays de Vladimir Poutine se crispe sous l’effet de la guerre, dans laquelle elle se complaît d’autorité. La répression s’accélère, cadenasse la société, musèle les opposants. Et tout se pétrifie.

(...)

Afin de poursuivre son entreprise impériale de destruction massive d’un voisin dont l’indépendance reste en travers de la gorge de Moscou, le Kremlin met sur pied une économie de guerre dont le succès donne lieu à des interprétations assez divergentes.

Parallèlement, se met en place une « société de guerre » aux conséquences politiques et sociales désastreuses, marquées par des régressions antidémocratiques tous azimuts, ainsi qu’en témoigne l’actualité des jours derniers. La répression de toute dissidence connaît une accélération à la veille des fêtes – Noël sera célébré en Russie dans la nuit du 6 au 7 janvier, en vertu du calendrier Julien que suivent les chrétiens orthodoxes. (...)

L’opposant numéro un, Alexeï Navalny, avait disparu de sa geôle de Vladimir (250 km à l’est de Moscou) depuis le 6 décembre – laissant place à de multiples rumeurs dont un troc possible avec Washington. Sa trace a été retrouvée le 25 décembre, jour de Noël selon le calendrier grégorien promulgué en 1582 par l’Occident honni.

De sa nouvelle prison de Kharp – dite « loup polaire », au-delà du cercle arctique et legs du Goulag –, Navalny a ironisé sur sa barbe de « père Noël », ayant poussé en ce lieu réputé pour sa dureté carcérale, tout en se montrant indomptable : « Je vais bien. Je suis soulagé d’être enfin arrivé. »

Qu’à cela ne tienne : le système Poutine, en réponse à cette bête noire qui ne cède toujours pas aux pires pressions, a fait condamner à neuf ans de détention, vendredi 29 décembre, par une justice aux ordres comme jamais, une affidée de Navalny : Ksenia Fadeeva, 31 ans, militante des droits de l’homme à Tomsk, en Sibérie. (...)

Deux poètes russes condamnés à la prison (...)

Motifs ? « Incitation à la haine » et « appels publics à commettre des activités contre la sécurité de l’État ». En cause ? Leur participation, le 25 septembre 2022, à un récital en plein air à Moscou, les « Lectures Maïakovski », au cours desquelles ils avaient déclamé des vers contre la guerre en Ukraine. (...)

Toute personne remettant la guerre en question ou manifestant de la sympathie envers l’Ukraine, même dans une conversation privée, s’avère désormais passible de poursuites en Russie.

Les dénonciations sont devenues monnaie courante. (...)

Exportation de la raison du plus fort

Le quotidien new-yorkais détaille les ravages de la censure ainsi que la répression qui s’abat sur les actions courageuses isolées osant symboliquement protester. Il en résulte un tableau saisissant de ce qui travaille une société en état de guerre, qu’un pouvoir tient en respect.

L’Europe occidentale ne pourra être qu’affectée par un tel mouvement martial agissant de façon tectonique sur le continent. L’exportation de la raison du plus fort, seule boussole du Kremlin, va bon train. Dans une enquête publiée samedi 30 décembre, le Washington Post détaille, documents à l’appui, comment la France est gangrenée par la propagande de Moscou, relayée par l’extrême droite lepéniste.

Il s’agit de réactiver l’égoïsme, teinté de lâcheté, à l’œuvre au moment des accords de Munich et de la guerre d’Espagne, lors de la course à l’abîme propre à la fin des années 1930 : croire se sauvegarder en refusant de se mêler à une cause jugée perdue ; laisser gagner le fauteur de guerre au nom de la préservation de la paix...

Tétaniser à la fois la population russe et l’esprit public occidental, telle est la stratégie à laquelle se consacre sous nos yeux, avec l’énergie de la désespérance nihiliste, la Russie effrénée de Vladimir Poutine bien décidée à embarquer son monde sous de tels auspices en 2024.