
Kayar fait partie des principaux quais de pêche artisanale au Sénégal. Il y a quelques années, c’était un des points de départ importants des embarcations pour l’immigration clandestine. Après plusieurs drames, les autorités ont lancé des campagnes de sensibilisation pour dissuader les jeunes. Des initiatives qui, si elles ont contribué à baisser les départs à partir de Kayar, ne dissuadent pas totalement les candidats à l’immigration.
Seynabou Sarr, la cinquantaine, vendeuse de poissons depuis plus de 20 ans, seau à la main, vient de s’approvisionner auprès des pêcheurs. Elle ne cache pas son amertume : "Notre souhait est que nos enfants restent ici avec nous pour développer notre commune, mais ce n’est pas le cas. D’ailleurs, vous voyez, l’essentiel des jeunes qui travaillent sur ce quai ne sont même pas natifs de Kayar. Ils viennent d’autres régions."
Ces jeunes dont elle parle sont des saisonniers. La pêche en mer, parfois sur plusieurs jours d’affilée, constitue pour eux une sorte d’entraînement pour le grand voyage. Des rangées de pirogues peintes en jaune, rouge et bleu tapissent le long du quai, attendant les prochains à la recherche du poisson. Un peu à l’écart, un groupe d’adolescents discute dans l’une de ces embarcations. Bassirou Mballo, 17 ans, utilise la pirogue de son père. Même si le but affiché est la pêche, il ne perd pas de vue son objectif réel : quitter le Sénégal pour l’Europe. "On a laissé nos parents à la maison. J’ai prévenu que si j’arrête la pêche, j’irai prendre la pirogue pour aller en Espagne. Je n’ai pas peur parce que depuis quatre ans, je pêche. Je vais partir en Espagne", affirme-t-il. (...)
Des rêves d’ailleurs nourris par la précarité
Depuis des dizaines d’années, Seynabou Sarr, de son côté, fréquente le quai de pêche, elle a vu les quantités de poissons diminuer au fil du temps. Et pour elle, il n’y a pas de doute, cela fait partie des raisons qui poussent les jeunes à partir (...)
Comment les retenir quand ils voient pousser de terre de grosses villas appartenant à ceux qui ont pu arriver en Europe ? Ces maisons sont de plus en plus nombreuses, au point que la commune s’est agrandie avec un nouveau quartier appelé Kayar Extension.