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Amnesty International
Soudan. Des systèmes d’armement de fabrication française repérés dans le conflit – nouvelles investigations
#Soudan #armes #AmnestyInternational
Article mis en ligne le 19 novembre 2024
dernière modification le 17 novembre 2024
  • Le système GALIX est visible sur des véhicules blindés de transport de troupes utilisés par les FAR
  • Ce système est fabriqué par Lacroix Défense et KNDS France
  • L’embargo actuel décrété par l’UE interdit le transfert d’armes au Soudan

Une technologie militaire de fabrication française installée sur des véhicules blindés de transport de troupes fabriqués par les Émirats arabes unis (EAU) est utilisée sur le champ de bataille au Soudan, ce qui constitue probablement une violation de l’embargo de l’ONU sur les armes à destination du Darfour, a déclaré Amnesty International à l’issue d’une nouvelle enquête.

Dans un document publié en juillet de cette année, Amnesty International dit avoir repéré dans plusieurs régions du Soudan des véhicules blindés de transport de troupes (VBTT) fabriqués par les Émirats arabes unis (EAU). De récentes recherches montrent que ces VBTT utilisés par les Forces d’appui rapide (FAR) sont équipés avec des systèmes de défense réactifs sophistiqués conçus et fabriqués par des entreprises françaises.

Les VBTT Nimr Ajban sont fabriqués aux EAU par Edge Group, et équipés avec le système GALIX français. Sur des images diffusées sur les réseaux sociaux et vérifiées par Amnesty International, on aperçoit sur des VBTT Nimr Ajban détruits ou capturés par les Forces armées soudanaises (FAS) le système GALIX. (...)

« Amnesty International a déjà montré que l’afflux constant d’armes au Soudan provoque d’immenses souffrances humaines. Tous les pays doivent immédiatement mettre fin à la fourniture directe ou indirecte de toutes armes et munitions aux parties au conflit au Soudan. Ils doivent respecter et appliquer l’embargo sur les armes à destination du Darfour décidé par le Conseil de sécurité des Nations unies afin que d’autres civil·e·s ne perdent pas la vie. »

Amnesty International a contacté le 15 octobre 2024 Lacroix Défense, KNDS France, ainsi que le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, en France, en soulignant que le système GALIX avait été repéré au Soudan. Au moment de la publication du présent document, Amnesty International n’avait pas reçu de réponse.
Accords commerciaux entre les EAU et la France dans le secteur de la défense

Les EAU et la France sont des partenaires commerciaux de longue date dans le secteur de la défense. Le Rapport de 2024 au Parlement sur les exportations d’armement de la France précise que les entreprises françaises ont été responsables de la fourniture aux EAU d’équipements militaires pour un montant estimé à 2,6 milliards d’Euros entre 2014 et 2023. (...)

L’Union européenne (UE) impose un embargo sur les armes pour tout le Soudan depuis 1994. L’embargo interdit la vente, la fourniture, le transfert et l’exportation vers le Soudan d’armes et de matériel connexe de tout type, y compris les armes et munitions, les véhicules et équipements militaires, les équipements paramilitaires et les pièces détachées.

La France est tenue au titre du droit international, régional et national d’interdire l’exportation d’armes lorsqu’il existe un risque important que les armes soient utilisées pour commettre ou faciliter de graves violations du droit international humanitaire ou du droit international relatif aux droits humains. Quand la France ne peut pas garantir par le contrôle des exportations, notamment par la certification de l’utilisateur final, que les armes ne seront pas réexportées vers le Soudan, elle ne doit alors pas autoriser ces transferts. Les EAU ont un long historique de violation des embargos sur les armes décidés par le Conseil de sécurité des Nations unies, y compris en ce qui concerne la Libye et le Soudan. (...)

Toutes les entreprises, y compris Lacroix Défense et KNDS France, ont la responsabilité de respecter les droits humains. Cette responsabilité exige que les entreprises fassent preuve de la diligence requise en matière de droits humains tout au long de leur chaîne de valeur – du point d’origine à l’utilisateur final – afin d’identifier, de prévenir et d’atténuer toute participation réelle ou potentielle à des violations des droits humains. La norme de diligence requise en matière de droits humains est renforcée pour les activités commerciales qui ont une incidence sur les zones touchées par un conflit.

Amnesty International demande également au Conseil de sécurité des Nations unies d’étendre son embargo sur les armes en vigueur au Darfour au reste du Soudan, et de renforcer ses mécanismes de mise en œuvre, de suivi et de vérification.
Complément d’information

Des combats ont éclaté au Soudan en avril 2023 entre les FAS et les forces paramilitaires des FAR. Depuis, plus de 23 000 personnes ont été tuées et 33 000 blessées, dont un nombre considérable de civil·e·s victimes d’attaques aveugles et délibérées. Le Soudan est actuellement touché par la plus grande crise de déplacement au monde, et la dernière escalade du conflit a déplacé plus de 11 millions de personnes.

Le 15 avril 2024, un an après le début du conflit armé en cours au Soudan, Amnesty International a lancé une pétition mondiale exhortant le Conseil de sécurité de l’ONU à étendre l’embargo sur les armes en vigueur au Darfour au reste du Soudan. Cela s’inscrit dans le cadre de la campagne d’Amnesty International demandant la protection des civil·e·s au Soudan et appelant à ce que les responsables d’atrocités commises contre des civil·e·s répondent de leurs actes.