Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Histoire coloniale et postcoloniale
Un article de Malika Rahal sur les relations franco-algériennes non-publié par Libération
#medias #journalistes #Algerie #France
Article mis en ligne le 19 juin 2025
dernière modification le 17 juin 2025

Le quotidien Libération a commandé en mars 2025 à Malika Rahal un article pour conclure une série consacrée aux relations franco-algériennes, mais ne l’a pas publié. Nous le faisons ici, après que l’historienne l’ait mis en ligne sur son carnet de recherches Textures du temps.

La relation franco-algérienne au temps de Retailleau et de Gaza

Le présent texte m’a été commandé mi-mars 2025 dans le cadre d’un dossier du journal Libération autour des relations entre la France et l’Algérie, dossier coordonné par le chercheur Paul-Max Morin. Après une première version, il m’était demandé une version plus longue pour conclure la série. Au cours des échanges avec la rédaction, des objections furent faites (l’ouverture notamment posait problème) mais les éclaircissements apportés furent jugés satisfaisants ; pourtant, la publication est sans cesse retardée, sans qu’aucune explication ne soit donnée à Paul-Max Morin ou à moi-même. Plus d’un mois après la sortie du dernier article de la série, en avril 2025, sa parution dans le journal n’a plus de sens. Je le publie donc ici. (...)

Rappelons ce qu’a représenté l’Algérie aux temps de l’Empire : d’une part une colonisation plus longue que les autres colonisations des 19e et des 20e siècles ; de l’autre une colonisation de peuplement dont la population européenne représentait, au moment de l’indépendance, 10% du total. Ces deux caractéristiques semblaient la rendre éternelle. Rappelons aussi que l’aspiration génocidaire à se débarrasser de la population autochtone est une constante des situations de colonisation de peuplement, puisque les colons veulent accaparer leurs terres et prendre leur place dans le pays. Elle trouve toujours des façons de se réaliser par la réduction de la population colonisée (concentration dans des camps ou limitation à un statut juridique aux droits diminués), par le déplacement forcé et par le massacre ; souvent par tout cela à la fois. La résistance face à la dépossession de la terre, de l’identité et de la mémoire de soi comme peuple aussi en est une constante, qui se manifeste dans des formes très variées, parfois les plus désespérées ou les plus violentes. L’indépendance de l’Algérie fut pleinement une décolonisation, qui supprima les statuts juridiques inégaux et conduisit à une redistribution de la terre. Elle ouvrait donc des espoirs pour les autres peuples colonisés, en particulier ceux de l’Angola et du Mozambique qui ne gagneraient leurs indépendances qu’en 1975. En 1962, en Algérie, les slogans des enfants évoquaient ces deux pays pour rappeler que la lutte contre la colonisation devait se poursuivre. Pour Algériens et Palestiniens, depuis 1962, la lecture en miroir de leurs deux situations coloniales fait souvent décrire « la Palestine comme le passé de l’Algérie et l’Algérie comme l’avenir de la Palestine ».

Et on comprend mieux pourquoi cette indépendance, décidément, ne passe pas.