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Mediapart
Un professeur visé par une enquête pour agression sexuelle enseigne au collège privé Notre-Dame-de-Sion
#Betharam #Stanislas #NotreDamedeSion #enseignementcatholique #educationNationale
Article mis en ligne le 5 avril 2025
dernière modification le 3 avril 2025

Un enseignant d’histoire-géographie passé par Stanislas avait été suspendu par le rectorat en février 2024 après une plainte pour agression sexuelle. Un an après, il a été réintégré dans les effectifs du collège parisien Notre-Dame-de-Sion alors que l’enquête est toujours en cours.

(...) La plaignante, inquiète de son statut d’enseignant, avait alerté toutes les écoles dans lesquelles travaillait le mis en cause de 63 ans avant de déposer plainte et de transmettre un document circonstancié au procureur de la République. L’agression sexuelle qu’elle dénonce aurait eu lieu en dehors d’un établissement en 2021. (...)

Selon nos informations, la plaignante avait recueilli d’autres témoignages mettant en cause le comportement de l’enseignant, et une étudiante de l’École du Louvre avait déjà signalé des faits à la direction de son établissement, en 2019, lorsque P. était son professeur. Interrogé par Marianne en 2024, le lycée Stanislas disait tout ignorer mais reconnaissait avoir déjà dû rappeler à l’ordre ce même enseignant. « Il s’est fait remonter les bretelles à plusieurs reprises, ces dernières années, en raison de propos inappropriés tenus à l’égard d’élèves de l’établissement », révélait un membre de l’équipe enseignante.

Dans un communiqué, le directeur de Stanislas déclarait alors qu’il ne restait désormais qu’à « attendre les suites qui ser[aient] données par le rectorat à cette procédure ».
Réintégré malgré plusieurs signalements

Quatre mois après, le rectorat a finalement levé cette décision disciplinaire. Si le parquet de Paris précise que « l’enquête est toujours en cours », la plaignante n’ayant d’ailleurs pas encore été auditionnée, P. peut de nouveau enseigner. « Décision prise par le rectorat », explique le service communication de Notre-Dame-de-Sion. (...)

Alors comment expliquer cette décision malgré cette plainte et ces signalements ? Auprès de Mediapart, le rectorat de Paris a livré plusieurs justifications. Interrogée une première fois, l’administration semblait d’abord reconnaître un dysfonctionnement. (...)

Questionnée enfin pour savoir si cette décision s’appuyait sur un texte ou une doctrine, l’administration a détaillé une gestion au cas par cas : « Le Rectorat et le Parquet échangent régulièrement et étroitement quant aux situations signalées impliquant nos personnels, précise l’académie de Paris contrainte de reconnaître que rien n’encadre ces situations. Chacun des cas étant examiné de manière individuelle, il ne peut y avoir de textes administratifs d’ordre général. »

La commission d’enquête révèle un grand flou

En pleine affaire Bétharram, la commission d’enquête sur les violences dans les établissements scolaires révèle justement les graves carences dans les contrôles et le suivi des signalements mettant en cause des professeurs. (...)

L’audition des représentants du ministère de l’éducation nationale n’a pas aidé à y voir plus clair. Interrogé sur le cas des enseignants mis en cause, Boris Melmoux-Eude, patron de la direction générale des ressources humaines (DGRH), a expliqué que tout recteur pouvait « prendre des mesures conservatoires » et décider d’une suspension. « Elle ne peut pas excéder quatre mois, sauf dans l’hypothèse où une procédure pénale est engagée », a-t-il précisé tout en rappelant que l’administration pouvait décider d’une sanction en toute indépendance lorsque la justice est saisie. (...)

Interrogé par la présidente de la commission d’enquête, Fatiha Keloua Hachi, le chef du service de défense et de sécurité du ministère de l’éducation, Christophe Peyrel, a ensuite été incapable de répondre sur le suivi des signalements dans le public. « L’organisation du ministère ne permet pas aujourd’hui d’assurer un tel suivi, ni l’organisation, ni d’ailleurs la façon dont fonctionne la seule application dont on dispose, l’application “faits établissements”. »

Le directeur général des ressources humaines a ensuite listé le nombre de sanctions prises contre le personnel du public et a été contraint d’admettre qu’il n’avait aucun regard ni aucune donnée pour les établissements privés : « La direction générale des ressources humaines n’étant compétente que sur les personnels de l’enseignement public. »

« Pour les enseignants du privé sous contrat qui sont également des agents du ministère, nous avons un processus un petit peu moins élaboré » (...)

Lors de cette audition, les responsables de l’Éducation nationale ont également reconnu n’avoir mis en place aucun suivi central des signalements et des suivis de ces signalements lorsqu’un agent est mis en cause. Ils ont aussi expliqué que la communication entre le ministère de l’éducation et le ministère de la justice, lorsqu’il y avait par exemple des enseignants condamnés, n’était pas automatique. (...)