Le ministère des armées a ordonné l’arrêt de toutes les exportations de la société Sermat vers Israël, révèle Disclose. Prise en toute discrétion fin octobre, cette décision confirme le risque que ce matériel pour des drones soit utilisé par l’armée d’un pays accusé de génocide à Gaza.
Les autorités ont fini par réagir. Selon nos informations, deux agents des douanes ont débarqué par surprise au siège de l’entreprise Sermat, à Nanterre (Hauts-de-Seine), le 21 octobre dernier. Motif de l’inspection : les contrats passés entre la société française et l’un des ses importants clients, l’industriel de l’armement israélien Elbit Systems. La dernière livraison en date devait décoller de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle le 20 octobre, mais elle a été bloquée aux douanes. Il s’agissait de huit générateurs électriques, qui ont été « saisis et seront probablement détruits », confirme à Disclose Franck Neuvessel, le directeur général de Sermat.
Comme Disclose l’a révélé quatre jours avant cette visite inopinée, Sermat fournit à Elbit Systems des composants mécaniques pour des drones. (...)
En plus de la visite des douanes, Franck Neuvessel a également été convoqué au ministère des armées. Il s’est vu notifier par la direction générale de l’armement (DGA) l’interdiction de livrer en Israël un quelconque composant sorti de ses usines. « Tout est arrêté », en raison du risque d’utilisation à Gaza, reconnaît le patron de Sermat.
Il a donc fallu attendre la publication de notre enquête pour que le gouvernement se mette en mouvement. En décidant de stopper l’expédition d’un colis et d’interrompre tous les contrats de Sermat avec Elbit Systems ou tout autre société israélienne, les services de l’État valident les conclusions de Disclose : il existe un risque important pour que les pièces exportées servent dans des bombardements qui ont déjà tué ou blessé plus de 50 000 enfants palestiniens depuis octobre 2023.
Comment expliquer que le gouvernement n’a pas agi plus tôt, alors que Sébastien Lecornu, l’ancien ministre des armées devenu premier ministre, clame depuis des mois qu’il « n’y a pas d’armes vendues à Israël » ? (...)
L’affaire Sermat souligne une nouvelle fois l’opacité et la défaillance du contrôle démocratique des exportations d’armement vers Israël. Depuis trois ans, Disclose a dévoilé l’existence de quatre marchés passés entre des entreprises françaises et des fournisseurs de l’armée. Et ce, alors que la Cour internationale de justice alerte sur le risque de génocide du peuple palestinien depuis le 26 janvier 2024.
L’an dernier, le montant des transferts d’armes françaises à l’État hébreu s’est élevé à 16,1 millions d’euros. Dans son rapport au Parlement, le gouvernement assure que « ces licences font l’objet d’un encadrement spécifique ». (...)
une fois le matériel sur le sol israélien, les autorités françaises ne contrôlent pas l’usage qui en est fait (...)