
Le Parlement a adopté jeudi le projet de loi pour "refonder" Mayotte. Sept mois après le passage du cyclone Chido, les défis sont immenses pour reconstruire ce territoire. Le texte prévoit notamment de durcir les conditions d’obtention d’un titre de séjour et de faciliter la destruction des bidonvilles
Sept mois après le passage du cyclone Chido, Mayotte est à reconstruire. Jeudi 10 juillet, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi pour "refonder" l’île. Fruit d’un compromis entre députés et sénateurs, le projet de loi avait été validé mercredi par les députés, avec le soutien de la coalition gouvernementale et de l’extrême droite. Il doit maintenant être promulgué par le président de la République. La gauche, elle, a dénoncé l’"obsession" de ce projet pour l’immigration.
Le texte s’attaque en effet à deux "fléaux", la lutte contre l’immigration clandestine et l’habitat illégal, "sans quoi" Mayotte risque d’être reconstruite sur du "sable", selon les mots de Manuel Valls. (...)
Il prévoit par exemple de durcir les conditions d’obtention d’un titre de séjour alors que près de la moitié de la population y est étrangère. Plusieurs dispositions permettent également de faciliter la destruction des bidonvilles, alors qu’un tiers de l’habitat est informel. Une mesure permet aussi de déroger à l’obligation d’une offre de relogement au moment d’une évacuation.
Cette "loi-programme" prévoit également 4 milliards d’euros d’investissements publics sur six ans et inscrit pour la première fois dans la loi la convergence sociale, c’est-à-dire l’alignement des droits sociaux avec les montants de l’Hexagone, avec pour horizon 2031. À Mayotte, 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté national, et le RSA, par exemple, y est encore deux fois plus bas.
Des mesures attendues sur l’archipel
Le projet de loi prévoit en outre plusieurs mesures très attendues sur l’archipel. D’abord, la suppression d’ici 2030 du visa territorialisé, qui empêche un détenteur d’un titre de séjour mahorais de venir dans l’Hexagone. Les Mahorais y voient une injustice et un manque de solidarité de la France métropolitaine face à l’afflux massif d’immigrés clandestins venus notamment des Comores voisines.
Le recensement exhaustif de la population à Mayotte dès 2025 est aussi inscrit dans la loi. Depuis des années, les élus locaux affirment que la population est sous-estimée avec pour conséquence des collectivités moins bien dotées qu’elles ne devraient l’être et des services publics saturés. (...)
Autre victoire pour les élus mahorais, la suppression de l’article facilitant les expropriations pour permettre la construction d’infrastructures dites essentielles. Cette mesure, ardemment défendue par le gouvernement et initialement votée par le Sénat, a provoqué une levée de boucliers sur l’archipel, les Mahorais s’inquiétant d’une mainmise de l’État sur le foncier. (...)
Environ 320 000 personnes s’entassent sur ce territoire d’un peu plus de 300 km2, dont près de la moitié sont des étrangers. Selon une enquête menée en 2016, environ "la moitié des étrangers" étaient alors "en situation irrégulière".
Dans ce contexte, Mayotte est soumis à un régime d’exception en matière du droit des étrangers : asile accéléré (dépôt des dossiers et traitement des demandes), titre de séjour particulier pour les étrangers qui ne leur permet pas de sortir du département, des aides sociales pour les demandeurs d’asile plus limitées qu’en métropole, absence de l’Aide médicale d’État...