
Il y a deux ans, Ada Colau, une militante du droit au logement, et le mouvement Barcelona en Comú s’installaient à la mairie de Barcelone. Les activistes qui les ont portés au pouvoir hésitent entre impatience et compréhension face aux difficultés à mettre en œuvre les réformes
On l’a surnommée la maire « indignée » de Barcelone, nom du mouvement citoyen qui a occupé les places d’Espagne au printemps 2011 pour protester contre les politiques d’austérité et la corruption et exiger une meilleure démocratie. Deux ans après son arrivée à la tête de la capitale catalane, Ada Colau, ancienne porte-parole et fondatrice de la Plateforme des victimes du crédit hypothécaire (PAH), doit lutter constamment pour tenir ses engagements. « C’est une femme intelligente qui a même un petit côté punk. Mais sa position n’est pas facile, car elle doit composer avec un héritage politique impossible à liquider en quelques mois », dit Efraín Foglia, chercheur et membre du réseau internet autogéré Guifi.
Les objectifs de la plateforme citoyenne Barcelona en Comú (Barcelone en commun) sont ambitieux : arrêt des expulsions et création de logements sociaux, lutte contre les inégalités et la gentrification, moralisation et transparence de la vie politique. De belles promesses, qui se heurtent à une réalité politique complexe, car Ada Colau est loin d’avoir obtenu la majorité, avec seulement 11 conseillers sur 41 sièges. Dès lors, il n’est pas évident d’appliquer les réformes tant attendues, notamment sur la question du droit au logement.
La précarité des logements est indubitablement liée au tourisme
Juste à côté de la place d’Espagne se trouve le local de la Plateforme des victimes du crédit hypothécaire (PAH). Chaque lundi, entre 70 et 100 personnes s’y retrouvent pour échanger leur expérience d’une expulsion, d’un retard de paiement ou de difficultés bancaires. Si l’assemblée était à ses débuts principalement composée de propriétaires, ils sont désormais une majorité de locataires, pris à la gorge par l’inflation des loyers. (...)
La problématique de la précarité des logements est indubitablement liée à celle du tourisme. En effet, l’engouement des voyageurs du monde entier pour la capitale catalane chasse les habitants des quartiers historiques du centre-ville vers les périphéries. La mairie tente d’agir avec les moyens légaux à sa disposition. En novembre 2016, elle a condamné la plateforme de location Airbnb à une amende de 600.000 euros pour des annonces illégales, sans que cela ne suffise pas à apaiser la colère des habitants. À Sants, quartier proche de la gare, des collectifs organisent régulièrement des manifestations pour dénoncer « l’invasion » touristique. Dans le quartier populaire et festif de Gràcia, les autocollants et les tags hostiles aux touristes pullulent sur les murs.
Pour tenter d’enrayer le phénomène, Ada Colau a lancé un plan spécial d’urbanisation (le PEUAT) encadrant strictement la construction et l’ouverture de nouveaux établissements hôteliers. Une mesure qui a déclenché la colère de ses opposants. (...)