
Un mois après le meurtre de la collégienne de 12 ans tuée dans des circonstances macabres, une marche a eu lieu mercredi à Paris pour lui rendre hommage. La mère de la jeune fille s’est exprimée pour la première fois et a notamment appelé à « ne pas répondre à la violence par la violence »
(...) Les capuches et les parapluies recouvrent les visages sombres des centaines d’anonymes venus témoigner leur soutien aux proches de Lola. Ils attendent de pouvoir rejoindre la famille de la jeune parisienne, assassinée le 12 octobre à 12 ans, postée quelques mètres plus haut, devant l’immeuble où elle habitait il y a encore un mois.
La pluie et le ciel morne conjuguent leurs efforts pour éteindre la lueur entretenue par les roses blanches et les tee-shirts blancs à l’effigie de la collégienne, portés pour cette marche voulue par ses proches. On peut y lire un message : « Tu étais le soleil de nos vies, tu seras l’étoile de nos nuits. »
Les camarades de classe de Lola prennent ensuite la tête du cortège, direction la mairie du XIXe arrondissement de Paris, où Delphine, la mère de la jeune fille, doit s’exprimer pour la première fois depuis le drame, le 14 octobre dernier. « Vivre avec et sans Lola, comprendre l’incompréhensible, c’est la situation dans laquelle nous sommes », résume-t-elle, la voix tremblante. (...)
Philippe, un retraité habitant le coin depuis de longues années, partage la douleur de la famille, mais tient à préciser que ce drame ne reflète pas la tranquillité du quartier : « On se sent très bien ici, les communautés cohabitent sans problème, relativise-t-il. La médiatisation à outrance de ce drame peut donner le sentiment inverse, mais ça reste un malheureux fait divers. Ce n’est pas lié à un phénomène de société. »
Une bulle médiatique aux conséquences bien réelles
Ils sont plusieurs dans le quartier à garder un mauvais souvenir de l’agitation médiatique des dernières semaines. Anne, la cinquantaine, gérante d’une boutique de soins esthétiques, déplore « le voyeurisme » qui a placé un temps la rue Manin au centre de l’actualité nationale (...)
Le tumulte médiatique s’est même invité tout près du collège Georges-Brassens où était scolarisée Lola. La veille du retour en classe des élèves, une association de parents d’élèves du XIXe arrondissement avait déjà pris la mesure du risque dans un mail prémonitoire adressé aux familles : « Nous sommes particulièrement vigilants à ce que la presse ne transforme pas cette mort atroce en un sordide fait divers et nous avons refusé les interviews à ce sujet. »
Il n’avait pas fallu plus d’un jour pour confirmer cette intuition. Le lundi suivant la disparition de la fillette, les caméras des chaînes d’information se sont attroupées à l’entrée de l’établissement. Les parents d’élèves du collège, excédés, s’étaient alors indignés de « la pression médiatique » maintenue par « certains médias aux abords du collège et de la résidence de Lola, en poursuivant parfois les enfants pour les interroger ».
Anticipant les retombées psychologiques de ce tapage sur les enfants et les personnels éducatifs, l’Académie de Paris avait envoyé un mail indiquant la marche à suivre aux professeurs des écoles du secteur. Toute communication avec la presse y était formellement interdite. L’ouverture d’une cellule psychologique pour les élèves avait également été annoncée. (...)
La frénésie médiatique a aussi ouvert la voie à la récupération politique. Un meurtre sordide dont la principale suspecte, Dahbia B., est une Algérienne visée par une obligation de quitter le territoire (OQTF) : l’occasion de rapprocher délinquance et immigration était trop belle pour une partie de la droite et de l’extrême droite.
À Rennes, Strasbourg et Lyon, des centaines de personnes avaient défilé dans les rues, agitant des banderoles « l’immigration tue » et scandant « immigrés assassins ». Sur la porte d’une mosquée près de Bordeaux, des tags islamophobes réclamant « Justice pour Lola » avaient été découverts, accompagnés de la mention « revanche nationaliste ». (...)