
Pour Human Rights Watch, « la reconstruction de l’après-séisme en Haïti néglige les femmes et les jeunes filles ». L’ONG a publié le 30 août dernier le rapport « Personne ne se souvient de nous – Le droit des femmes et des filles à la santé et à la sécurité n’est pas protégé dans l’Haïti de l’après-séisme ».
Le tremblement de terre de janvier 2010 a fait environ 222 000 morts, 300 000 blessés et contraint entre 1,3 et 1,6 million de personnes à abandonner leur habitation. Environ 300 000 logements et la majeure partie de l’infrastructure du pays, dont les établissements hospitaliers, ont été endommagés ou détruits.
300 000 femmes et jeunes filles vivent dans des camps pour personnes déplacées. Human Rights Watch en a interrogé 128, âgées de 14 à 42 ans, résidant dans 15 camps différents, qui étaient enceintes ou avaient eu un bébé depuis le tremblement de terre.
Le constat est cruel : accouchements à même le sol dans une tente, parfois dans la rue, agressions sexuelles, viols, sexe en échange de sécurité et de nourriture sont monnaie courante pour ces Haïtiennes.
(...) Pour elles, les conditions étaient déjà difficiles avant le séisme. Haïti connaissait le taux de mortalité maternelle le plus élevé de l’hémisphère occidental (continent américain) 630 pour 100 000 naissances viables. Il n’y a pas de chiffres depuis le séisme. Le rapport révèle que « les habitants des camps ont confié à Human Rights Watch que les décès dans les camps, quelle qu’en soit la cause, ne sont généralement pas enregistrés. Dès lors, si des femmes et des filles meurent dans des camps pour des raisons liées à une maternité, leurs décès ne seront pas enregistrés ».
« Les problèmes que rencontrent les Haïtiennes dans les camps ne sont pas des problèmes nouveaux. Mais, il y a plus d’aides disponibles. Et, malgré l’aide internationale, elles continuent à lutter pour avoir accès à des soins basiques », nous explique Amanda Klasing, chercheuse à la division droits des femmes de HRW et auteure du rapport. (...)
Elles n’ont pas les ressources pour payer le transport ou les examens nécessaires au suivi de leur grossesse. Certaines pensent que si elles n’ont pas fait l’échographie payante elles ne peuvent pas retourner à l’hôpital pour accoucher. Ce qui n’est pas le cas.
« Il n’y a pas de politique identifiable de genre concernant la reconstruction à Haïti »
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« Les femmes ont des rapports avec les hommes pour pouvoir nourrir leurs enfants. Cela arrive souvent. Même les jeunes filles sont contraintes d’avoir des relations sexuelles pour survivre. Souvent les femmes tombent enceintes sans le vouloir et elles n’ont personne pour s’occuper d’elles. 60 centimes ou 1,25 dollar – vous avez un rapport sexuel juste pour ça. Malheureusement, les femmes tombent quelquefois enceintes mais si nous avions accès aux contraceptifs, nous nous protégerions… Ce n’est pas bon de se prostituer mais que faire ? Il faut manger… »
Une spirale infernale.