
Depuis l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine, les actes antimusulmans augmentent en France. Ils ont atteint, avec l’agression de deux jeunes femmes voilées à Paris, un niveau inquiétant.
Deux jours après la décapitation de Samuel Paty, deux femmes voilées étaient attaquées extrêmement violemment au couteau sur le Champ-de-Mars, à Paris. Coup sur coup cette semaine, une mosquée de Bordeaux a été dégradée et une de Béziers a été visée par des menaces explicites sur les réseaux sociaux. Loin de constituer des faits divers isolés, cela témoigne, selon Arié Alimi, avocat des victimes de l’agression parisienne et de la Ligue des droits de l’homme, d’une ambiance délétère, dans un contexte post-attentat.
« Nous sommes en train d’assister à un basculement des esprits du côté de l’obscurantisme », analyse l’avocat, qui n’hésite pas à parler de « déferlement raciste contre les musulmans ». Abdelaziz Manaa, vice-président de la mosquée Nour El Mohamadi de Bordeaux – la plus ancienne de la cité girondine –, abonde : « C’est la deuxième plainte que nous déposons, après celle de la semaine dernière. Les tags, ça ne date pas d’hier, on ne dépose pas plainte à chaque fois car on n’a jamais de nouvelles (…). Par contre, c’est la première fois qu’on a de la casse, ça commence à partir en vrac. » Attisé par les discours de certains responsables politiques – y compris des ministres en exercice –, ce « basculement » s’opère désormais largement dans l’opinion publique, note Arié Alimi. « Il ne s’agit plus seulement de l’extrême droite raciste. L’arc est beaucoup plus large, plus diffus. La majorité des forces politiques, y compris à gauche, sont en train de basculer dans cette stigmatisation », estime l’avocat.
Une agression grave « dont on ne peut pas nier le caractère raciste »
C’est cette violence dirigée contre les musulmans que Kenza et Amel ont subie dimanche dernier, alors que les deux jeunes femmes se promenaient en famille à Paris. (...)
L’avocat des victimes appelle à l’apaisement
Au lendemain de l’hommage national au professeur d’histoire-géographie de Conflans-Sainte-Honorine, alors que l’union nationale ne fut qu’un vain mot et que l’exécutif s’apprête à durcir son projet de loi contre les séparatismes, l’avocat de la Ligue des droits de l’homme en appelle à l’apaisement. « On ne combat pas la violence par la violence. Il convient de prendre de la hauteur plutôt que de s’en prendre à des institutions qui sont totalement dévouées à la République depuis toujours comme l’Observatoire de la laïcité. Il faut faire un travail social, éducationnel, donner les moyens à ceux qui protègent la République, aux enseignants qui donnent l’esprit critique aux enfants. C’est comme cela que l’on traitera les germes du terrorisme. »