
Chez Evercontact, c’est tous les jours la fête du travail, potentiellement. La start-up française permet à ses salariés de prendre autant de jours off qu’ils le souhaitent…
Partir en congé sans compter, en étant payé. Le principe fait rêver, même au pays des RTT. Philippe Laval, patron d’une start-up bleu-blanc-rouge, Evercontact, en a fait une réalité. Et c’est la seule en France, à notre connaissance.
Partant du constat qu’il prenait lui-même sept semaines de vacances par an environ, soit davantage que ce que prévoit la loi depuis 1981 et sans rien demander à personne, il a souhaité offrir la même liberté à ses dix salariés.
« En droit français, les dirigeants d’entreprise ne comptent pas le temps qu’ils passent en vacances, contrairement aux cadres qui sont autant impliqués dans une start-up. J’ai trouvé cela injuste. »
Alors le créateur de cette entreprise, qui propose des services de gestion des carnets d’adresse en ligne, s’est inspiré des petits Poucet californiens devenus des géants du Web : Twitter, Netflix, Evernote et FullContact sont les précurseurs des vacances à gogo.
La course aux talents
Car dans la Silicon Valley, c’est un peu la course au bien-être des salariés pour appâter les meilleurs talents, compte tenu de la pénurie d’ingénieurs. Entre la cantine gratuite chez Yahoo et Google et les vacances à volonté au pays de l’oiseau bleu, les entreprises rivalisent d’idées. (...)
Un petit tour de passe-passe
Restait à transposer l’idée pondue outre-Atlantique dans le droit du travail français, autrement plus contraignant. L’expert comptable d’Evercontact a concocté un petit tour de passe-passe : tous les mois, il décompte systématiquement un douzième de congés payés à chaque salarié, qu’il les prenne ou pas, soit 2,5 jours ouvrables. Pour Philippe Laval :
« Le seul danger, c’est qu’un jour, on se sépare d’un collaborateur et qu’il nous dise qu’il n’a pas pris ses congés et nous demande de les lui payer. C’est un risque humain qu’une start-up peut se permettre de prendre. »
Et encore, pour Eva Touboul, avocate en droit du travail, l’entreprise est protégée :
« Il suffit qu’il y ait eu un process habituel de demande de congé et une acceptation de la direction, par e-mail par exemple, pour couvrir l’entreprise et prouver que le salarié a pris des vacances. Et s’il se casse une jambe au ski, il ne pourra pas essayer de le faire passer pour un accident du travail ! »
« Il y a peu de risques juridiques »
Aussi surprenant que cela puisse paraître, selon l’avocate (...)
Les patrons non plus ne sont pas perdants… Avec une politique pareille, le turnover est faible. Depuis la création de l’entreprise en 2011, seul un salarié a décidé de la quitter. (...)
Pas plus de sept semaines par an
Au final, chez Evercontact, personne n’abuse du système. L’équipe s’organise pour combler l’absence des uns et des autres dans la mesure du possible. Les tâches comme le support client ou le développement sont réparties le temps des vacances des collègues.
Philippe Laval estime qu’en moyenne, chaque salarié prend environ sept semaines de bon temps dans l’année… Soit environ autant que le Français lambda, si l’on ajoute les RTT aux congés payés !
Et pour Thomas Doctrinal, qui a fait ses classes dans une société d’informatique classique avant d’intégrer Evercontact il y a quatre ans, c’est suffisant (...)
En contrepartie, l’équipe se rend très disponible, même à l’autre bout du monde. Les doigts de pieds en éventail, oui, mais toujours un œil sur la boîte e-mail professionnelle, « mis à part quand on part loin, sans possibilité de se connecter, cela m’arrive également », précise Philippe Laval.
Des réunions tard le soir
Si le patron ne dénombre pas les jours de congés, en échange, les salariés ne comptent pas leurs heures. Sachant que 80% de la clientèle d’Evercontact est américaine, ils travaillent souvent en soirée, décalage horaire oblige. (...)
Les chiffres de l’entreprise, eux, sont diffusés : Philippe Laval tient à une transparence totale. Le chiffre d’affaires est présenté tous les mois et les salaires de chacun sont connus de tous.
Par ailleurs, au moins une fois par semaine, le chef d’entreprise fait livrer des sushis et des pizzas pour un déjeuner avec l’équipe au complet. Précédé, pour les motivés, par une séance de yoga… Pour ouvrir ses chakras à même l’open space.