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Banlieues : « Une discrimination structurelle imprègne la société suédoise »
Article mis en ligne le 3 mai 2013
dernière modification le 30 mai 2013

Les banlieues du « modèle suédois » s’enflamment aussi. Depuis une semaine, des émeutes agitent les quartiers populaires de Stockholm ou Malmö. « Cela démarre à chaque fois par une provocation de la police », explique Irene Molina, spécialiste suédoise des violences urbaines, qui critique également l’absence de toute politique d’intégration et la forte persistance de discriminations. Entretien.

(...) Irene Molina : Au début des années 90, alors que ces populations avaient déjà commencé à habiter ces quartiers, le projet néolibéral, qui était global, a débuté en Suède. Il a commencé avec le démantèlement des services publics locaux, comme les bureaux regroupant plusieurs services administratifs, des centres de soin, les agences de l’emploi. Les Suédois blancs sont partis et de plus en plus d’étrangers sont venus n’ayant pas d’alternative sur le marché immobilier. Ces quartiers sont des espaces de marginalisation, les jeunes n’y ont pas d’espoir dans le futur ni de confiance en l’État suédois. Mais ça, on le sait depuis longtemps, et ce n’est pas qu’en Suède. (...)


Depuis les années 1990, la police intervient de façon beaucoup plus agressive dans ces quartiers
. Il y a notamment les incessants contrôles au faciès, mais aussi de vastes opérations : la police boucle un quartier ou une sortie de métro, sans expliquer quoi que ce soit. Les jeunes sont soupçonnés en permanence, on leur demande leurs papiers constamment, ce qui n’arrive pas ailleurs à Stockholm ou avec les Suédois blancs. La police agit donc de façon contraire à la loi suédoise, dans ces quartiers et nulle part ailleurs. Résultat, c’est une énorme source de frustration et de colère pour les gens. (...)

Le gros problème de la politique suédoise d’intégration, c’est la discrimination structurelle qui imprègne la société suédoise : l’emploi, le logement, jusqu’à l’accès en boite de nuit. Une discrimination structurelle qui est d’ailleurs plus ou moins acceptée en Suède. On donne certes un peu d’argent pour des petits projets dans les quartiers défavorisés, mais cela en est presque humiliant.

Le problème n’est pas tant l’échec de la politique d’intégration que l’absence de réelle politique d’intégration en Suède. Elle est seulement rhétorique. Tant que l’on ne fait rien pour changer les attitudes des entreprises, des institutions, et que l’on continue de croire que les immigrés ne veulent pas s’intégrer et qu’il faut donc les y amener par la contrainte, on ne règlera pas la discrimination structurelle.

L’image de la Suède, pays des droits de l’homme et État tolérant, se maintient, car la Suède a été très forte pour entretenir son image par le discours. (...)