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"C’est la pire des politiques" : en Belgique, des milliers de mineurs afghans ne sont plus protégés
#MNA #Belgique
Article mis en ligne le 31 mai 2023
dernière modification le 30 mai 2023

Depuis près de deux ans, la Belgique n’accorde plus de protection aux mineurs afghans. Bruxelles considère que l’Afghanistan n’est plus en guerre puisque les Taliban contrôlent l’entièreté du pays. Déboutés de l’asile et dans l’impossibilité d’être renvoyés, ces jeunes se retrouvent dans un no man’s land administratif, qui perdurera à leur majorité.

À la différence de la France, un mineur isolé arrivé en Belgique doit demander l’asile ou la protection subsidiaire - comme un majeur - pour être pris en charge par les autorités. Même si son dossier est refusé, il pourra en théorie être hébergé dans un centre – en Europe, on ne peut pas expulser un enfant.

En revanche, il ne se verra pas attribuer de tuteur, essentiel pour l’aider dans ses démarches administratives ou sa scolarité. Et à sa majorité, il sera considéré comme un sans-papiers.
Un taux de protection en nette baisse

"Désormais, l’asile est uniquement accordé à une petite catégorie de MNA afghans, les plus vulnérables : ceux arrivés très jeunes en Belgique ou ceux souffrant de graves traumatismes", assure à InfoMigrants Clément Valentin, chargé de plaidoyer au Ciré (Coordination et initiatives pour réfugiés et étrangers).

Entre 2017 et 2021, le taux de protection accordée à des mineurs afghans s’élevait à 74%. En 2022, il est tombé à 40%, selon les chiffres de l’association.

Comment expliquer un tel revirement du gouvernement belge ? La politique à l’égard de ces ressortissants a changé après le retour des Taliban à Kaboul, en août 2021. Les autorités estiment que le pouvoir des fondamentalistes religieux ne représente plus une menace car en contrôlant l’entièreté du pays, aucune guerre n’est en cours. (...)

Cette protection est délivrée sous trois conditions : risques de peine de mort, de traitement inhumain et dégradant, et de violences aveugles.

"On présuppose que l’Afghanistan n’est plus en guerre civile donc que les Afghans ne sont plus en danger en rentrant chez eux. En suivant cette logique, ils n’ont plus besoin de protection", explique à InfoMigrants Benoit Van Keirsblick, directeur de l’ONG Défense des enfants international Belgique et membre du comité des droits de l’enfant des Nations unies.

Le même cas de figure se pose au sujet du statut de réfugié. (...)

Pour qu’un Afghan voit sa demande acceptée, il doit prouver que son retour au pays est impossible puisque la vie qu’il a construit en Belgique est incompatible avec les préceptes des Taliban. Pour cela il faut combiner plusieurs éléments : le sexe et l’âge du mineur, son milieu et sa région d’origine, le travail de sa famille au pays, la durée de séjour en Europe, s’il a une relation amoureuse en Belgique…etc.

"Cela n’a pas vraiment de sens. Dans la Convention de Genève [qui régit le statut de réfugié, ndlr], l’intégration d’une personne n’est pas le sujet mais plutôt le risque de persécution dans son pays", s’insurge Clément Valentin.
"Fabrique de sans-papiers"

Résultat : les mineurs Afghans se retrouvent dans un no man’s land administratif, livrés à eux-mêmes. La plupart d’entre eux ne sont pas hébergés dans les centres d’accueil, notamment en raison de leur saturation. Ils n’ont droit à rien, et ils sortent des radars des associations.

"C’est la pire des politiques", s’agace Benoit Van Keirsblick (...)

Les associations déplorent une "fabrique de sans-papiers". Aucun envoi en Afghanistan n’est possible. "On créé des générations de personnes qui vont vivre dans l’illégalité", critique encore Benoit Van Keirsblick.

Selon les spécialistes interrogés, la politique de Bruxelles a pour but de freiner les arrivées d’Afghans dans le pays - première nationalité des demandeurs d’asile, chez les mineurs et les majeurs.

En agissant ainsi, la Belgique devient un des pays de l’Union européenne (UE) avec le plus faible taux de protection des MNA afghans. À ses côtés, se trouvent la Bulgarie et la Hongrie. (...)