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L’ Humanité.fr
Ce que cette famille Rom m’a appris, le temps d’un repas chaud
Reportage de Nicolas Calvin, vingt-cinq ans, Roubaix (Nord), jeune correspondant de Libres échanges
Article mis en ligne le 20 janvier 2014
dernière modification le 17 janvier 2014

(...) La première question qui me vint à l’esprit, la plus stupide aussi, fut : « Pourquoi venir en France ? » Pourquoi quitter son village, sa famille, ses proches, ses amis ? Caroline est arrivée pour la première fois en France il y a cinq ou six ans, un peu par hasard. Plusieurs fois expulsées, elle et sa mère sont toujours revenues dans l’Hexagone.

De sa vie en Roumanie, elle ne me décrit que les aspects les plus durs : le froid, la faim, la misère dans les baraques. Elle veut me montrer Gadjo Dilo, de Tony Gatlif, pour me faire découvrir à quoi ressemble un village tzigane. Elle me montre aussi des séries télévisées roumaines, celles où l’on peut voir de somptueuses fêtes organisées dans leurs grandes demeures par de riches Roms, « ceux qui s’en foutent pas mal de la merde des autres ». Elle me parle des biscuits secs, un luxe, et de la manière dont, plus jeune, elle collait ses chewing-gums sur le mur de sa chambre pour pouvoir les remâcher le lendemain. Déclassés, les Tziganes vivent en parias. Parce qu’ils sont roms, ils ne peuvent pas travailler, ou alors pour des salaires de misère, une poignée d’euros qui ne permettrait à personne de vivre décemment.

Ils ont avalé des milliers de kilomètres de route pour goûter à une autre misère, moins amère de ce côté-ci de l’Europe. Caroline le répète : si elle est renvoyée en Roumanie, elle reviendra, quel qu’en soit le prix. Pour elle, pour sa mère, pour la petite Edessa, qui pendant ce temps s’amuse avec tout ce qu’elle trouve sur la table du salon. (...)