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Observatoire des inégalités
Ceux que l’on paie pour étudier : enquête sur les privilégiés de l’école
Article mis en ligne le 3 septembre 2017
dernière modification le 2 septembre 2017

Être payé entre 1 300 et 2 300 euros mensuels pour étudier, ce n’est pas donné à tout le monde. Une poignée d’élèves de quelques grandes écoles publiques touchent le jackpot. (...)

Pas une mince somme : entre 1 300 et 2 300 euros par mois, ce que certains touchent après des années d’ancienneté au travail, bien au-delà des bourses de l’enseignement supérieures versées aux plus pauvres. Bonus : ces années d’études sont prises en compte pour la retraite : celles-ci sont donc déduites de leurs années de vie active !

Pour la plupart des jeunes des milieux modestes ou des couches moyennes qui obtiennent le bac, poursuivre des études coûte très cher, parfois trop même pour qu’ils puissent en envisager. Un quart de l’ensemble des étudiants doit travailler tout en étudiant (voir encadré). Être serveur dans la restauration rapide et suivre les cours dans l’enseignement supérieur demande des efforts considérables. Tout l’inverse de ceux qui obtiennent d’être payés en étudiant.

Comment ça marche ? Le principe est simple : dans certaines écoles qui préparent à la fonction publique, l’État rémunère la formation de l’étudiant à condition qu’il s’engage à le servir durant dix ans au minimum. (...)

Cerise sur le gâteau, une partie des élèves sélectionnés par ces grandes écoles acquièrent, dès leur entrée en formation, le statut de fonctionnaire stagiaire avec tous les avantages qui en découlent en matière d’avancement, mais surtout celui de commencer à cotiser pour leur retraite pendant leurs études. Non seulement ils ont la chance de faire des études pour lesquelles ils seront très largement rémunérés toute leur vie mais, en plus, ils gagnent un bonus de deux ou trois années de travail en moins ! Qui dit mieux ?

Pourquoi donc faudrait-il payer des jeunes pour étudier ? À l’origine, l’idée est d’attirer vers le service public une partie des meilleurs élèves. En contrepartie, ils s’engagent à servir la collectivité pendant dix ans à l’issue de leurs études. Ce qui pouvait se comprendre quand la fonction publique manquait de hauts cadres mais qui a perdu sa raison d’être aujourd’hui, sans être supprimé.

Devenir haut fonctionnaire, enseignant, juge ou ingénieur aéronautique n’a plus rien d’un sacrifice : la "contrepartie", servir l’État pendant quelques années, est très mince. Le financement des études devient une pure aubaine pour un grand nombre d’enfants issus de milieux ultra-favorisés.

Plus choquant encore : l’engagement décennal pour les élèves de certaines grandes écoles n’est pas toujours respecté [3]. Les futurs cadres formés pour la fonction publique partent en effet souvent exercer dans le privé où les salaires sont beaucoup plus élevés. Dans ce cas, la règle veut que les élèves remboursent une partie des frais de scolarité pris en charge par l’État durant toutes leurs études, mais les usages ne sont pas aussi clairs. (...)

À une période où l’argent public se fait rare, il ne serait pas difficile de lui trouver un meilleur usage, en élargissant par exemple les bourses d’enseignement supérieur aux classes moyennes ou en incitant financièrement des enseignants expérimentés à exercer dans les établissements où les élèves sont les plus en difficulté.