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La ZEP.fr
Chez nous, tu peux mourir pour rien du tout
Imane, 14 ans, collégienne, Paris
Article mis en ligne le 28 février 2021
dernière modification le 27 février 2021

Des rixes, j’en ai vu beaucoup dans mon quartier. Et les décès qui vont avec. Malheureusement, on s’est habitués.

L’embrouille qui m’a le plus marquée, c’est le jour où un garçon s’est fait planter à l’arrêt de bus, à Botzaris. Je marchais et j’ai vu ce mec, un métis, en caleçon, en sang, le couteau encore dans son ventre. Il avait du sang à l’oreille, il criait et pleurait. Je n’ai jamais su s’il était mort ou s’il avait survécu. Cette scène nous a fait du mal avec ma copine. Quand tu vois ça, ça te choque. Encore aujourd’hui, je n’ai pas les mots… C’est comme ça chez nous, cité place des Fêtes dans le 19e. Là où j’ai grandi, tu peux mourir pour rien du tout, même pour une petite histoire. (...)

Parfois c’est des bagarres, parfois des descentes, des règlements de comptes. Ou à force de défendre les gens, tu peux te faire planter, tuer… Il y a beaucoup d’embrouilles. Souvent, avec des armes de tous types : couteaux, barres de fer, gazeuses… Si tu ne fais pas partie du quartier, tu peux te faire embrouiller. Une fois, ma grande sœur a ramené un gars de son lycée et ils se sont posés dans le bâtiment. Des mecs de la cité sont venus lui demander d’où il était, ce qu’il faisait là. Ils ont même essayé de lui voler sa sacoche. Ma mère lui a dit de dormir à la maison, au cas où. (...)

Les jeunes, ils ne sortent pas, ils restent trop entassés dans le quartier. Et, à force d’y rester, ça crée des bagarres. Je me souviens d’une embrouille où, avec ma sœur, on a su que quelqu’un du quartier était mort. (...)

En fait, son meilleur pote s’embrouillait avec d’autres gars pour une histoire de meuf. Il est venu le défendre car ça commençait à chauffer. Il a essayé de calmer le jeu, mais en se retournant pour partir, il s’est fait planter. Il est mort plus tard, en arrivant à l’hôpital. Son meilleur pote a tout vu. Il est mort dans ses bras.

Quand j’ai appris qu’il était mort, sur le coup je me suis imaginée sa tête et ce qu’il s’était passé. Après sa mort, j’ai vu son pote partir en n’importe quoi : il n’allait plus en cours, il fumait… Il n’était pas bien. C’était son meilleur ami, comme un frère. Il est mort alors qu’il n’était jamais dans les embrouilles. Il avait 15 ans, presque mon âge… (...)