
Le mouvement social qui agite le Brésil ne sort pas de nulle part : depuis deux ans, les mobilisations urbaines se succèdent contre les grands projets imposés d’en haut, sans aucune consultation publique. A Rio, des quartiers entiers sont « restructurés » au mépris du droit, et des milliers d’habitants de favelas sont expulsés pour cause de Mondial de foot et de Jeux Olympiques. Ce qui n’empêche pas de nombreux collectifs de résister et de construire des alternatives à cette gestion autoritaire de la ville.
(...) Plus de 8 000 expulsions de logement en trois ans à Rio : tel est le premier bilan de la Coupe du monde de football organisée par le Brésil en 2014, suivie des Jeux Olympiques en 2016. Ce chiffre est avancé par RioOnWatch [1], un collectif d’organisations qui étudie les conséquences de ces deux méga-évènements sur les habitants et les communautés locales. Pour accueillir investisseurs et visiteurs, la ville de 6 millions d’habitants s’est lancée dans une restructuration urbaine, aussi vaste qu’autoritaire, imposée de façon opaque et sans participation des populations concernées.
Construction ou rénovation d’installations sportives, comme le célèbre stade de Maracanã, nouvelles voies rapides, extension de lignes de métros, restructurations urbaines impliquant des démolitions... Autant de projets qui représentent d’énormes budgets, gérés sous la forme de partenariats public/privé, qui induisent une implication toujours plus grande du secteur privé et des grandes entreprises dans la gestion de la ville.
Transfert des populations pauvres (...)
Des plans d’aménagement proposés par des habitants
Vila Autodromo est une favela qui a plus de 40 ans où vivent environ 500 familles. Elle est située au bord du lac de Jacarépagua, dans la zone ouest de la ville. Longtemps rurale et excentrée, la zone s’est fortement urbanisée ces dernières années, et y ont été construites diverses grosses infrastructures (le Parc d’exposition RioCentro, la « Cidade do Rock » où se tient annuellement le festival « Rock in Rio »). Elle doit également accueillir la future Cité olympique. La favela fait l’objet de tentatives d’expulsions de la part des pouvoirs locaux depuis les années 1990, suite à la valorisation immobilière grandissante de la zone. Ses habitants ont su très vite organiser leur résistance. Mais la perspective des JO offre à la municipalité un argument de choix pour procéder à leur expulsion. Arguant dans un premier temps vouloir récupérer le terrain de Vila Autodromo pour y construire des infrastructures sportives, la municipalité prétend aujourd’hui vouloir y faire passer deux voies rapides. En réalité, si les arguments changent et évoluent, l’intérêt reste le même : la valeur immobilière potentielle du terrain. (...)