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Comment les régimes autoritaires menacent les démocraties
#democratie #dictature
Article mis en ligne le 29 janvier 2023
dernière modification le 28 janvier 2023
  • Les démocraties sont aujourd’hui dans « une situation périlleuse », à cause des crises politique, climatique et sanitaire récentes.
  • La définition de « démocratie » évolue constamment, et elle se redéfinit aujourd’hui autour de plusieurs approches : illibéraliste, climatique et technophile.
  • Les démocraties doivent aujourd’hui rivaliser avec des systèmes non-démocratiques qui sont aussi performants, voire plus, et très prospères.
  • La technologie est utilisée par des régimes autoritaires pour injecter de la division et du chaos dans les démocraties, ou retirer de grandes masses d’informations.
  • La démocratie a besoin de performances de court ou moyen terme… incompatibles avec les mesures à prendre pour le climat : leur efficacité ne se verra que sur le long terme.

Guerre en Ukraine, réchauffement climatique, pandémie de Covid-19… Les événements récents fragilisent les régimes démocratiques. Ces derniers seraient actuellement dans « une situation périlleuse », selon Dominique Reynié, directeur général de la Fondation pour l’innovation politique, qui a mené une enquête sur la démocratie dans 55 pays. Malgré un attachement clair des citoyens à ce modèle, « les États démocratiques doivent résister à des crises internes et des mutations délicates qui bouleversent leurs fondements », explique le politologue.

Vous avez étudié la démocratie dans 55 pays. Quelle définition donneriez-vous de ce régime ?

La démocratie est un régime qui repose sur un principe et un mécanisme : le principe, c’est la souveraineté populaire ; le mécanisme, c’est la désignation des gouvernants par les gouvernés. Dans l’histoire du fait démocratique, on compte deux grandes filiations. La première conduit à penser qu’il n’y a de démocratie pleine et entière que la démocratie d’assemblée, où le peuple se réunit, délibère et décide sans représentant. La deuxième, c’est le gouvernement représentatif, élu avec des élections compétitives, ce que nous vivons aujourd’hui dans les démocraties libérales.

Il y a des enjeux politiques forts dans la façon de définir la démocratie, de s’approprier le terme. La Chine se décrit notamment comme une « démocratie socialiste », dans quel but ?

Comme pratiquement toutes les notions utilisées en politique, les définitions sont traversées par des conflits d’interprétation. (...)

La démocratie n’a pas cessé d’évoluer, même en tant que gouvernement représentatif, que ce soit par l’élargissement du droit de suffrage, par la multiplication des élections… Aujourd’hui, on remarque plusieurs éléments d’évolution possibles.

En premier, le passage de nos régimes libéraux pluralistes vers des régimes « illibéraux », comme celui de Viktor Orbán en Hongrie. L’illibéralisme, c’est une démocratie avec des élections, mais sans respect pour l’État de droit (...)

On trouve également de nos jours le discours d’un au-delà de la démocratie basé sur l’impérieuse nécessité de préserver l’environnement. (...)

Un troisième élément d’évolution peut être une approche technophile. (...)

La démocratie est un régime fragile, par essence : il ne tient pas sans l’adhésion ou le consentement des gouvernés. (...)

Nous devons faire face à des pays qui ne sont pas des démocraties, ce qui n’est pas nouveau, mais qui sont prospères, ce qui est inédit. (...)

La démocratie a besoin de performances de court ou moyen terme. Actuellement, on tente d’expliquer qu’on ne pourra plus les garantir : c’est l’apparition d’un problème systémique, majeur, qui menace la survie du système démocratique, fondé sur le consentement des gouvernés.