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Commerce équitable : de belles histoires à (se) raconter
Article mis en ligne le 12 mai 2015
dernière modification le 5 mai 2015

Parmi les crises que nous traversons, il semblerait que nous souffrons particulièrement d’un sentiment d’isolement toujours plus grand. La société de consommation qui nous entoure de produits pour notre bien-être individuel semble impuissante à combler notre besoin de lien et de rencontres, nos besoins de convivialité au sens fort du terme (de cum-vivere : vivre ensemble).

Ce besoin de vivre ensemble qui est un besoin de sociabilité, entretien des rapports subtils avec la logique marchande qui tire ses profits d’une part de la multiplication des équipements individuels (il est bon pour les affaires que chaque consommateur achète son propre produit) et d’autre part de la massification des désirs (que tout le monde souhaite la même chose au même moment, permet dans une logique industrielle de diminuer les coûts et d’augmenter les bénéfices). C’est ainsi qu’une société bien connue a construit son succès commercial en vendant le même produit à des millions de personnes avec pour slogan « think different » : pensez différemment !

Dans ce contexte, une tendance semble se dessiner que l’on pourrait résumer par une aspiration à « moins de biens, plus de lien ». Il semble en effet que les consommateurs aspirent de moins en moins à posséder (de nouveaux objets) et de plus en plus à vivre de nouvelles expériences ou à bénéficier d’un « accès » à un « usage » . Cela ouvre la voix à l’économie de fonctionnalité (acheter un usage plutôt qu’un produit) et à l’économie collaborative appelée aussi économie du partage (satisfaire son besoin grâce à ses pairs)

Or dans l’expérience vécue et l’usage, la présence de moments conviviaux et la possibilité de se sentir relié avec d’autres personnes semblent essentielles. Le succès des réseaux sociaux, qui ont créé de nouvelles modalités pour se relier à d’autres (« amis » virtuels, contacts, communautés…) peut être interprétée comme une manière de répondre à ce besoin de lien. Une autre illustration de cette tendance est le développement de l’économie collaborative qui prend une place importante dans le domaine du transport (covoiturage), de l’hébergement de loisir (location chez l’habitant) ou de la vente de biens entre particuliers et qui répond probablement en partie à cette même logique : retrouver des occasions de faire du lien.

L’ordre des motivations pour s’engager dans ces nouvelles pratiques est intéressant à questionner. (...)

La première motivation est clairement financière : partager les frais d’un voyage, s’héberger pour un coût raisonnable, gagner quelques euros en revendant ses biens sur internet…
La seconde motivation trouve son origine dans ce besoin de lien social : passer un bon moment lors d’un voyage, découvrir le mode de vie des gens qui nous hébergent, accueillir des voyageurs chez soi, ou encore rendre visite à un habitant du quartier pour vendre ou acheter un objet.

Enfin, la dernière motivation (la cerise sur le gâteau) est écologique : on est satisfait de participer à la réduction des émissions de CO2 ou d’occuper un logement qui serait resté vide, ou bien encore de réduire ses déchets en donnant une seconde vie à un objet.

On pourrait résumer cela en disant qu’on commence pour des raisons financières, qu’on continue pour des raisons liées au lien social, mais qu’on revendique surtout nos motivations écologiques. On retrouve ici de façon concrète et incarnée les trois dimensions du développement durable : économique, sociale et écologique.

Le commerce équitable dont le succès ne se dément pas, relève probablement du même type de logique : répondre à notre besoin de nous sentir reliés les uns aux autres, de vivre une expérience riche et de donner un sens à nos actes quotidiens. (...)

Faire un achat équitable nous permet peut-être de ressentir notre contribution à la construction d’un monde un peu moins absurde, un peu moins inégalitaire. Cela nous permet de donner un autre sens à nos actes d’achat. En effet, on peut faire l’hypothèse que la petite histoire que nous nous racontons au moment de l’achat ou de la consommation d’un café ou d’un chocolat équitable vient nourrir elle aussi notre besoin de lien et de sens.

Nous pouvons imaginer que le « petit producteur » qui est à l’autre bout de la chaîne de distribution (et parfois à l’autre bout du monde) va avoir une forme de reconnaissance pour notre acte solidaire et qu’un lien peut ainsi se créer entre nos deux réalités si différentes. Un lien où malgré les écrasantes inégalités entre nos deux situations, nous pouvons rêver d’être à égalité de dignité.

Les évolutions récentes du marketing des produits équitables ont d’ailleurs bien intégré cette conciliation des deux logiques de plaisir et d’engagement avec des slogans du type « ce que je déguste (un produit fin réservé aux connaisseurs).... ce que je défends...(L’autonomie, la dignité, la qualité de vie des producteurs) » D’abord le plaisir et ma propre satisfaction, ensuite les valeurs et l’éthique. (...)