
(...) Médiatisé notamment par l’association de défense animale L214, la maltraitance animale est un sujet qui ne peut pas être dissociée de la consommation. Le sujet est vaste et l’article ci-dessous s’efforce de donner aux consommateurs quelques repères.
"Il semble, en effet, que si je suis obligé de ne faire aucun mal à mon semblable, c’est moins parce qu’il est un être raisonnable que parce qu’il est un être sensible ; qualité qui, étant commune à la bête et à l’homme, doit au moins donner à l’une le droit de n’être point maltraitée inutilement par l’autre".
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, J-J ROUSSEAU (1755) Un sondage a récemment montré que 98 % des Français estiment qu’il est important de protéger le bien-être des animaux d’élevage tandis que 88 % pensent que le bien être animal devrait être mieux protégé qu’il ne l’est actuellement en France (1). Le même sondage réalisé dix ans plus tôt donnait des pourcentages respectivement de 79 % (- 19 %) et de 86 % (- 2 %). La thématique du bien-être animal et son lien avec la consommation d’aliments d’origine animale (viande, œufs, produits laitiers …) est une préoccupation récente et croissante dans les modes de consommation des français.
Pourtant, des chercheurs s’intéressent à l’éthologie, l’étude du comportement des animaux, depuis les années 80. Aujourd’hui, les chercheurs français sont regroupés au sein de AgriBEA, réseau scientifique de recherche sur le bien-être animal, où ils ont contribué à certains travaux qui rendent d’ores et déjà possible la définition de critères objectifs pour mesurer le degré de bien-être des animaux (...)
Plus récemment, les événements tragiques filmés dans certains abattoirs et diffusés par l’association L214 éthique et animaux ont choqué l’opinion et ont contribué à une prise de conscience plus large des législateurs. Toutefois les avancées réglementaires et stratégiques concernent essentiellement l’amont de la chaîne et se préoccupent peu des consommateurs.
La stratégie 2016-2020 du ministère de l’agriculture pour le bien-être animal (3), par exemple, précise les axes stratégiques pour les prochaines années. Dans ce document, qui vise notamment à accroître le partage "des bonnes pratiques" à tous les niveaux de la chaîne de production et à mieux lutter contre la maltraitance, la consommation n’est que très marginalement évoquée : le citoyen doit seulement être associé aux travaux qui seront conduits.
Dans la lignée de cette stratégie, le ministère de l’agriculture a annoncé la création d’un centre national de référence sur le bien-être animal qui sera chargé d’organiser la mise en commun des travaux de recherche pour poursuivre la définition du bien-être animal.
Enfin, au début de l’année 2017, une proposition de loi (4) relative au respect de l’animal en abattoir a été adoptée par l’Assemblée Nationale. Issue de la commission d’enquête "Conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français", cette loi renforce les contrôles et les sanctions possibles contre les abattoirs (notamment par la mise en place de la vidéo-surveillance).
Alors, est-ce tout de même possible de consommer en étant attentif au bien-être animal ?
En l’absence de label spécifique pour indiquer les produits respectueux du bien-être animal, comment peut-on acheter des produits d’origine animale tout en respectant les animaux ? Il existe quelques façons d’être vigilant en tant que consommateurs. Tout d’abord, les labels tels que le label Agriculture biologique et le label Rouge permettent de s’assurer de la prise en compte de certaines dimensions du bien-être des animaux. Le cahier des charges de ces deux labels impose en effet des caractéristiques techniques spécifiques (accès au plein air, limitation de la densité d’élevage, minimisation des temps de transports). De la même manière, les catégories des œufs (0 : agriculture biologique ; 1 : plein air ; 2 : élevage au sol sans accès plein air ; 3 : en cage) rendent accessible l’information sur le lieu de vie des poules pondeuses.
Face à l’évolution des attentes des consommateurs et des contraintes réglementaires, davantage de producteurs prennent en considération ces problématiques-là. (...)
les distributeurs innovent en créant des labels ad hoc afin de proposer à leurs clients les produits qu’ils souhaitent consommer. Et compte tenu de la forte demande, les initiatives individuelles vont se multiplier. Sous prétexte de ne pas vouloir accumuler les labels, le refus de création d’un label spécifique au bien-être animal par la Commission Européenne laisse ainsi le champ libre aux industriels pour utiliser leur propre définition et leur propre critère, avec le risque que cela se fasse au détriment des animaux.