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Dasani, 12 ans, SDF, l’« enfant invisible » de New York
Article mis en ligne le 17 décembre 2013

C’est le reportage dont toute la presse parlait la semaine dernière aux Etats-Unis, « l’enfant invisible » : une remarquable enquête du New York Times qui suit le parcours d’une jeune new-yorkaise de 12 ans, Dasani, et la vie d’une famille dans un foyer pour sans-abris de Brooklyn.

Pour la journaliste Andrea Elliott qui les a suivi pendant toute une année, c’est aussi l’une des conséquences des politiques publiques qui ont eu pour effet « de rejeter les pauvres aux frontières de la ville ».

En douze ans, New York s’est considérablement enrichie mais tout le monde n’en n’a pas profité de la même manière.

En 2004, Bloomberg a mis en place des politiques visant à « pousser les sans-abris à compter davantage sur eux », en leur supprimant notamment un accès prioritaires aux logements sociaux contre des aides au logement à court terme et des formations professionnelles (...)

Il y a trois ans, après l’annulation du programme d’allocations logements Advantage, ses parents ont du quitter leur maison de Staten Island en face de Manhattan et ont atterri dans un foyer d’urgence de Fort Greene, la Auburn Family Residence.

Les neufs membres de la famille occupent depuis une pièce de 52 m2 et partagent les douches et la cantine avec d’autres familles en attente d’un logement social fixe.

Ce qui était censée être une transition (le séjour moyen d’une famille y est de treize mois) est devenu un lieu de vie.

Aujourd’hui à New York, 250 000 personnes sont en attente d’un logement social et 50 000 sont logés dans une centaine de foyers pour sans abris – une augmentation de 71% depuis 2002 pour les individus et 83% pour les familles.

Ils sont placés sous la responsabilité du Department of Homeless Services (le service des sans-abris) qui gère un budget de 800 millions de dollars qui a presque doublé en dix ans.

Et pourtant, l’établissement où vit la jeune Dasani et 280 autres enfants, un ancien hôpital reconverti par la mairie dans les années 80, semble avoir été abandonné à son sort :

« C’est un endroit où la moisissure se glisse entre les murs et les cafards essaiment, où les excréments et le vomi bouchent les toilettes communes. Où les prédateurs sexuels errent et les enfants montent la garde de leurs mères célibataires à l’entrée des douches sales. » (...)

Pour ces 22 000 enfants qui habitent dans ces « shelters » (abris), un nombre jamais égalé depuis la Grande dépression, l’école, l’autre institution publique capable de leurs venir en aide, est elle aussi en sursis.

Celle de Dasani, l’école secondaire Susan McKinney, située à Fort Greene, a subi plusieurs coupes budgétaires et suppressions de personnel ces dix dernières années et c’est l’une de ses institutrices doit aujourd’hui combler à son compte le manque de matériel.

En s’installant à la mairie de New York, Bloomberg a pris le contrôle du système éducatif et décidé de fermer plus d’une centaine d’établissements publics sous fréquentés, déficitaires, ou en manque de résultats. (...)

«  Des années de recherche ont montré les coûts sociaux énormes des enfants dans la pauvreté. Ils grandissent avec moins d’éducation et un pouvoir d’achat plus faible. Ils sont plus susceptibles de tomber dans la drogue, d’avoir des maladies ou troubles psychologiques, et de finir en prison. » (...)

L’histoire de cette famille, exceptionnellement tragique, parue tout au long de la semaine dernière en première page du deuxième quotidien du pays, a eu le mérite de susciter les débats.

Elle témoigne d’une réalité bien souvent passée sous silence dans les médias et par les politiques qui préfèrent célébrer une métropole toujours plus riche, plus attractive mais malheureusement encore plus inégalitaire. (...)