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Derrière les paquebots de luxe construits à Saint-Nazaire, une « génération intérim » très précaire
Article mis en ligne le 1er juillet 2018
dernière modification le 30 juin 2018

« Il y a tellement de constructions en cours chez STX et les sous-traitants, je pourrais avoir du boulot pendant un an » : de nombreux travailleurs des chantiers navals de Saint-Nazaire, malgré des carnets de commande remplis pour les prochaines années, n’ont d’autre horizon que le travail temporaire. Une armée d’intérimaires se répartit au sein d’un réseau tentaculaire d’entreprises sous-traitantes, qui assurent une flexibilité maximale du travail, tout en diluant les responsabilités en cas d’accident. Passage obligé pour beaucoup de jeunes ouvriers, le travail temporaire finit souvent par durer.

« En gros, les intérimaires comme nous, on est à la construction, chez les sous-traitants. Les embauchés STX, ce sont surtout des contrôleurs qui viennent vérifier si le boulot est bien fait, nous donnent des consignes sur les modifications à faire », explique Emmanuel, un jeune électricien qui travaille à l’intérieur du Celebrity edge, le paquebot de 300 mètres en cours de construction dans le bassin d’armement de Penhoët. Il installe des LED pour le compte d’un sous-traitant, enchaînant les contrats au mois. « Je gagne plus que si j’étais en CDI, grâce à la prime de précarité », dit-il, installé dans sa voiture, pour la pause déjeuner.

Pour beaucoup d’intérimaires, le CDI n’est plus nécessairement considéré comme étant le statut qui leur apporte le plus d’avantages, dans un système de sous-traitance en cascade où les entreprises externalisent leur recrutement aux agences d’intérim. « Avec la sous-traitance, on n’a pas un seul employeur sur les chantiers, mais plus de 200, pointe Alain Georget, de la CGT Navale. Cela va de pair avec une précarisation croissante des statuts. Alors qu’on est dans une situation de pleine charge, avec des perspectives de production jusqu’en 2026, l’intérim reste stable. Il n’est pourtant censé être utilisé qu’en cas d’accroissement temporaire d’activité. »

Les carnets de commande sont pourtant pleins(...)

Venus des quatre coins de la France, certains « entendent dire qu’il y a du boulot à Saint-Nazaire. Alors ils essaient de s’y fixer, explique Julie Brechet, une responsable du foyer. Mais ici, l’économie est cyclique, alors les intérimaires sont les premiers à sauter quand l’activité ralentit. » À l’heure du dîner, dans le brouhaha de la salle commune, elle part faire une partie de baby-foot avec trois jeunes, avant de poursuivre : « Beaucoup ont signé des contrats d’un mois ou deux avec une promesse d’embauche, qui au final ne se concrétise pas. Cela complique la recherche de logements, ou encore les demandes d’aides. »