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France Culture
Deux chercheuses détenues en Iran lancent une grève de la faim pour Noël
Article mis en ligne le 26 décembre 2019

Depuis leur cellule de la prison d’Evin à Téhéran, la Franco-iranienne Fariba Adelkhah et l’Australienne Kylie Moore-Gilbert appelent à l’aide et entament une grève de la faim stricte. Aux USA le camp Trump fournit des arguments à ses supporters pour avoir le dernier mot dans les repas de Noël.

La première, c’est donc l’australienne Kylie Moore-Gilbert qui vient de passer son deuxième Noël en détention dans la prison d’Evin au nord de Téhéran. The Herald Sun, journal de Melbourne d’où est originaire la jeune femme, a eu accès à deux lettres ouvertes qui viennent tout juste de nous parvenir après avoir déjoué la surveillance de ses geoliers. La première a été écrite en juin : la détenue, spécialiste en études islamiques à l’université de Melbourne, y implore le Premier ministre Scott Morrison de la "sortir de là", de ne pas l’obliger à passer un deuxième Noël derrière les barreaux ; car Kylie Moore-Gilbert est une fervente catholique, le chef du gouvernement australien aussi... elle en appelle donc à sa foi pour "faire immédiatement tout ce qui est possible pour [lui] permettre de retrouver les siens". L’universitaire explique qu’il en va de sa "santé physique et morale, qui dit-elle, se détériore un peu plus chaque nouveau jour" qu’elle passe en détention. (...)

Il y a aussi une deuxième lettre... et une deuxième chercheuse emprisonnée : cette co-détenue, c’est l’anthropologue française Fariba Adelkhah. Elle est prisonnière depuis 7 mois dans cette même prison d’Evin. On trouve son nom au bas de la deuxième lettre ouverte qui semble dater de ces tous derniers jours. Selon le site d’info Iran International, Kylie Moore-Gilbert et Fariba Adelkhah y donnent des précisions sur leurs conditions de détention : elles sont tenues à l’isolement dans un quartier à part de la prison, sous la surveillance spéciale des Gardiens de la Révolution islamique ; elles disent "subir des tortures psychologiques, des violations répétées de [leurs] droits élémentaires". Elles annoncent surtout qu’à compter de ce jour de Noël, elles démarrent "une grève de la faim stricte, refusant toute nourriture et toute boisson". Les deux femmes appellent d’ailleurs leurs proches, leurs amis, à en faire de même symboliquement aujourd’hui pour marquer leur solidarité malgré l’éloignement physique. (...)

Mais ce qui frappe jusqu’au quotidien La Jornada au Mexique, c’est le message transmis par les captives : elles expliquent lancer cette grève de la faim pour exiger leur propre libération bien sûr, mais bien au-delà "pour la liberté académique", pour "demander justice au nom des innombrables, des milliers d’hommes et de femmes, universitaires, chercheurs, qui en ce moment, en Iran et au Moyen-Orient, subissent le même sort, emprisonnés sans avoir commis aucun crime et menacés par l’oubli".

C’est aussi en leur nom à tous que le journaliste irano-américain Jason Rezaian prend la plume dans The Washington Post. Une tribune qui constate que la détention de ces chercheurs semble d’autant plus cruelle en cette période des réjouissance de Noël. (...)

Rezaian sait d’autant mieux de quoi il parle qu’il a lui-même passé 544 jours (dont deux Noëls) dans cette même prison d’Evin. (...)

Il y a donc de l’espoir, semble vouloir nous dire Jason Rezaian dans le Washington Post... à condition toutefois que les leaders occidentaux arrêtent de "se perdre en calculs sur le coût politique éventuel de ces libérations" : libérer les innocents de Téhéran, c’est la seule priorité, conclut Rezaian. "Ignorer leur appel à l’aide n’est plus une option".