
Le 25 août dernier, une vingtaine de retenus mettent le feu à des draps pour protester contre leurs conditions d’enfermement au Cra du Mesnil-Amelot. Entre lacrymos et coups de matraque, la réponse de la police sera très musclée.
Centre de rétention du Mesnil-Amelot (77) – Il est 22h passées ce 25 août quand les exilés déclenchent l’émeute. Une poignée de retenus enfermés en attente d’être expulsés du territoire enflamment les draps de leurs lits. Puis en passant par une fenêtre, ils se hissent sur le toit. Selon les témoins interrogés par StreetPress, les insurgés revendiquent de meilleures conditions de vie au sein du Centre de rétention administratif (Cra). Il s’agirait d’une tentative d’évasion, conteste la police.
Les 15 bleus présents appellent du renfort. Une cinquantaine d’hommes débarquent. Depuis le toit du bâtiment, « des retenus lancent des bouteilles d’eau sur la police », raconte Charles (1) (2), un Nigérian retenu au Cra depuis trois mois : (...)
Les jauges, alors limitées à 80% depuis la période de pandémie, « sont remontées à 100%, la pleine capacité de 120 places est de nouveau atteinte », détaille l’association. Et sans nouveau personnel, « il n’est désormais plus possible pour les retenus de se balader seuls ou de ramener de la nourriture dans leurs chambres ».
À cela se greffent l’insalubrité et la vétusté des locaux. Il n’y a ni douches ni toilettes dans le bâtiment 7 du Cra du Mesnil-Amelot. Les retenus doivent traverser la cour pour rejoindre des sanitaires très sales. « Ils ne nettoient que la lunette des toilettes », révèle Ali. Les points d’eau sont en piteux état, « plein de crachats et de pisse », continue-t-il. Dans les chambres, les lumières ne fonctionnent plus, des rats se promènent et les punaises de lit prolifèrent, il finit :
« J’ai des petits boutons partout. »
De l’autre côté de la cour, au Cra 3, cohabitent des femmes et leurs enfants dans les mêmes conditions de vie insalubres. Au Mesnil-Amelot, « c’est pire qu’en prison. Ils sont traités comme des animaux », affirme l’accompagnatrice juridique de la Cimade (...)
« Il s’agit de personnes en détresse. Beaucoup ont des pathologies lourdes à porter et sont vulnérables psychologiquement. Certaines sont sous curatelle. »
« Ici, les gens crèvent de faim », affirme Charles. Si certains dénoncent la taille des portions, la plupart contestent surtout le contenu de l’assiette (...)
La Cimade le confirme : « Toutes les personnes maigrissent rapidement ici. La qualité et la quantité des repas ne sont pas suffisantes. Les femmes se plaignent de douleurs abdominales et d’être malades. » (...)
Un Cra sous le feu des critiques
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) a déjà épinglé le Cra du Mesnil-Amelot en 2010, 2011, 2014 et 2019 pour le mauvais traitement des retenus. « Un effort doit être porté sur le maintien des conditions d’hébergement matérielles des personnes retenues. Les dispositifs de verrouillage des portes de sanitaires, les portes des armoires, les fontaines à eau et les éclairages défectueux doivent être remplacés. L’hygiène des locaux doit être améliorée », inscrivait notamment l’instance dans son dernier rapport d’inspection. (...)
En mars dernier, c’était la neuvième fois que la Cour européenne des droits de l’Homme condamnait la France pour traitement inhumain, dégradant et la présence d’enfants dans ses Cra.