
Devant les présidents d’universités, le Président a esquissé les grandes lignes de ce que serait un deuxième quinquennat pour l’enseignement supérieur et la recherche : l’émergence d’établissements à l’américaine, et donc payants.
Vers toujours plus de libéralisme dans les universités. S’il est réélu, Emmanuel Macron s’attaquera à la sacro-sainte quasi-gratuité des études supérieures en France. C’est ce qu’il a annoncé lors de son discours de clôture du 50e anniversaire du congrès de la Conférence des présidents d’universités, jeudi soir.
« On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants », a lancé le chef de l’Etat. Avant de décrire, dans un enchaînement logique qui nous échappe, un monde de l’université « où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale ». Faire payer les étudiants pour lutter contre la précarité des étudiants, en somme.
La tendance était déjà là, même si les choses n’avaient peut-être jamais été dites aussi directement. (...)
Avant cette sortie, Emmanuel Macron s’était d’abord lancé dans un satisfecit étonnant sur la gestion de la crise sanitaire dans les universités – on rappelle que le gouvernement a attendu de voir nombre d’étudiants aux soupes populaires pour agir. Mais le président de la République s’est félicité de toute son action dans le secteur depuis cinq ans. Cocasserie notable, l’une des preuves de cette réussite serait le « bond de géant » qu’aurait réalisé l’Université Paris-Saclay, « qui s’est directement hissée à la treizième place cette année » dans le classement de Shanghai des universités. Un « bond de géant » d’une place, puisque cette université était classée quatorzième l’an passé.
Fort de ce bilan, Emmanuel Macron veut « redoubler d’efforts pour qu’à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte, qu’elle attire à elle les meilleurs étudiants et talents internationaux ». Pour ce faire, le candidat s’est engagé à débloquer plus de moyens, sans détailler combien, mais il a surtout affirmé que les efforts financiers « ne se suffis[ai]ent pas à eux-mêmes ».
Autre chantier : l’accès à l’emploi. « L’université doit d’abord préparer nos jeunes à exercer leur futur métier. […] En somme, elle doit devenir plus efficacement professionnalisante », a-t-il affirmé. Une volonté qui devrait déboucher vers l’ouverture de places en filières courtes, alors même que ce sont les diplômes les plus élevés qui protègent le plus du chômage. Globalement, c’est bien la professionnalisation, le lien avec le monde de l’entreprise et l’innovation qui sont mis en avant. Une vision « utilitariste » de l’université dénoncent certains. Le président, qui appelait les scientifiques internationaux à venir en France pour « make our planet great again », semble bien loin
Big bang institutionnel
C’est le serpent de mer depuis quinze ans, et la « loi relative aux libertés et responsabilités des universités » portée par Valérie Pécresse en 2007 : Emmanuel Macron a appelé à, encore, revoir la gouvernance des universités. « Oui, nous devons aller vers plus d’autonomie en termes d’organisation, de financement, de ressources humaines », a-t-il lancé. L’objectif est évidemment de viser « plus d’excellence pour les universités ». Des réformes en cascade qui ont toutes contribué à diminuer la démocratie et la collégialité dans la gouvernance des établissements et le suivi des carrières. (...)
Pourtant, lors des débats sur la « loi de programmation de la recherche » votée en 2020, l’essentiel du mouvement de contestation avait été porté par les personnels des universités qui travaillent sous statut précaire. Emmanuel Macron est resté sourd à leurs demandes. Il s’agit là d’une réelle continuité avec la politique menée depuis cinq ans par Frédérique Vidal : des réformes menées à marche forcée, sans concertations ni prise en compte des expressions collectives émanant des instances de la communauté universitaire.
si l'université avait été payante, mon mari n'aurait pas été médecin mes amis n'auraient pas été ingénieur, chercheur, professeur......
Leurs parents étaient maraîchers, boulanger, travailleurs agricoles.— savin anne (@savinanne) January 14, 2022