
’’Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit’’ (Lacordaire)
C’est un exercice de style taillé sur mesure pour notre nouveau Président qui, à part peut-être la finance, n’a pas d’ennemi. Par définition des vœux doivent être rassembleurs : il convient de vanter les mérites des talents dont la France a besoin et de donner espoir à tous ceux qui sont moins favorisés par la réussite, il faut ménager la chèvre et le chou dans une déclaration très convenue faite pour contenter tout le monde, pour flatter les intérêts contradictoires voire opposés des uns et des autres. François Hollande, ex-premier secrétaire du parti socialiste, sait naviguer dans des eaux agitées par des courants contraires ; il ne connaît que trop les compromis et les « motions de synthèse ». La promotion du Nouvel an de la légion d’honneur, véritable inventaire à la Prévert, illustre ce faux-semblant : Yvon Gattaz, ancien président du CNPF (l’ancêtre du MEDEF), y côtoie le dessinateur Jacques Tardi qui vient d’ailleurs de refuser la décoration « avec la plus grande fermeté ». L’Etat s’amuse, l’espace d’un instant, à mettre sur le même pied d’égalité les riches et les pauvres, les travailleurs et les managers, les marchands de canons et les responsables d’ONG, les artistes et les militaires.
L’époque est aux oxymores et François Hollande, en bon samaritain immergé dans le libéralisme, veut concilier les contraires, résoudre les contradictions, dissoudre les oppositions dans un magma consensuel. Ainsi convient-il, par exemple, de « donner plus de stabilité aux salariés et plus de souplesse aux entreprises » . (...)
Comment espérer plus de justice sociale en instaurant davantage de souplesse dans les relations très déséquilibrées entre employeurs et salariés et en poursuivant la déconstruction du droit du travail ? Comment moins de droits et plus de libertés contractuelles pourraient-ils permettre d’améliorer le sort des travailleurs dont la principale caractéristique est d’être subordonnés à leurs patrons ? L’Etat en se retirant progressivement du jeu laisse la place à l’arbitraire et à la loi du plus fort, celle de l’entrepreneur. (...)
François Hollande a surtout souhaité une bonne année aux renards.
Il ne reste plus qu’à nous souhaiter une bonne année militante !