
Le 10 mai, la France commémorait la « Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions ». La France et l’Europe en ont-elles vraiment terminé avec l’esclavage ? Le 19 février dernier, le tribunal correctionnel de Nanterre a condamné à 18 mois de prison avec sursis et 60 000 euros de dommages et intérêts une femme qui avait maintenu en esclavage domestique pendant cinq ans une jeune fille arrivée en France à l’âge de 13 ans. La victime avait déposé plainte en octobre 2006. Il a fallu plus de 11 ans pour obtenir un jugement, pour « soumission d’un mineur à des conditions de travail et d’hébergement indignes, travail dissimulé et aide au séjour irrégulier », précise le Comité contre l’esclavage moderne, qui a accompagné l’esclave libérée.
(...) Le travail forcé, un phénomène en expansion en Europe
En 2016, plus de 40 millions de personnes, dont 10 millions d’enfants, étaient toujours victimes d’esclavage moderne, selon l’Organisation internationale du travail. Parmi elles 15,4 millions étaient victimes de mariage forcé et 24,9 millions de travail forcé, dont 4,8 millions exploitées sexuellement. La quasi-totalité des victimes d’exploitation dans l’Industrie du sexe et plus de la moitié des victimes de travail forcé dans les autres secteurs sont des femmes. (...)
En Grande Bretagne, une estimation du gouvernement dénombrait entre 10 000 et 13 000 personnes qui y seraient victimes de travail forcé, en 2013. Un numéro d’aide aux victimes d’esclavage moderne mis en place au Royaume Uni a reçu l’an dernier plus de 3700 appels et plus de 700 signalements par Internet de victimes potentielles(...)
La Grande Bretagne a adopté en 2015 un Modern Slavery Act, une loi de lutte contre l’esclavage moderne, dont le travail forcé. En Allemagne, le code pénal a également été modifié en 2016 pour mieux lutter contre le travail forcé. Même chose en Italie, où une loi est entrée en vigueur fin 2016 pour durcir les sanctions contre l’exploitation extrême des travailleurs agricoles. En France, la loi a été amendée en 2013 pour mieux punir la traite des être humains à visée d’exploitation par le travail. Ces ajustements juridiques suffiront-ils à enfin bannir totalement l’esclavage du continent européen ?