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Etat d’urgence climatique : la COP21 répond par un texte d’une rare indigence !
Le blog de Maxime Combes, économiste et membre d’Attac France.
Article mis en ligne le 6 décembre 2015

Un texte a été adopté ce samedi 5 décembre comme base de négociation pour la phase ministérielle qui débute lundi 7 décembre. Présentée comme « un moment historique », cette décision ne peut masquer la très grande pauvreté du texte, comme si l’état d’urgence climatique s’arrêtait à la porte de la COP21.

(...) Nous avons assisté à une longue série d’interventions d’auto-congratulations qui peuvent apparaître un peu décalées au regard de l’ensemble des points conflictuels qui ne sont pas résolus. Plus frappant encore, parler de moment historique au moment où, Chennai, la 4ème ville la plus peuplée d’Inde est paralysée par des inondations qui ont déjà fait au moins 269 morts, apparaît déplacé et inconvenant. Surtout quand personne n’y fait référence au sein du Bourget. (...)

La suite ? « Rien n’est décidé avant que tout soit décidé » a-t-il été rappelé. Ce texte (ici en anglais et ici en français), qui ne change pas fondamentalement des textes précédents, servira désormais de base de négociation pour les ministres des 195 pays qui seront à Paris à compter de lundi matin. Ils auront la tâche de régler l’ensemble des points de débats pour présenter un projet d’accord « jeudi matin au plus tard », selon Laurence Tubiana. Si on en croit l’agenda officiel, il est toujours question d’adopter « l’Accord de Paris » ce vendredi 11 décembre. Officiellement. (...)

Comme le montrent désormais de nombreuses études, y compris l’évaluation réalisée par l’ONU, les contributions nationales volontaires des Etats conduisent à un réchauffement climatique supérieur à 3°C d’ici la fin du siècle. Il aurait été logique que l’écart entre le souhaitable (les 2°C ou moins) et le réel (les 3°C ou plus) soit au cœur de la négociation de Paris et que les Etats s’accordent pour se répartir les efforts supplémentaires nécessaires. Comme le confirme cette première semaine de négociations, ce n’est pas le cas. Ces contributions ne seront pas revues à la hausse lors de la COP21, parce qu’aucune des puissances de la planète n’en a la volonté. (...)

Ce dispositif de « name and shame », où les Etats nomment leurs objectifs et sont ensuite pointés du doigt s’ils ne les réalisent pas, devrait aujourd’hui conduire à blâmer les pays qui sont trop éloignés de leur juste part en matière de lutte contre les dérèglements climatiques. C’est ce que fait l’étude menée par de très nombreuses ONG et syndicats, intitulée CSO Equity review, signée par Attac France, dont les résultats ont été publiés ce vendredi, dans un relatif anonymat, notamment du côté de la presse française. Une étude qu’abhorre la présidence française – et notamment Laurence Tubiana – tant elle concourt à montrer la faiblesse intrinsèque des INDCs et à montrer du doigt les pays riches. Des résultats dont nous avions dévoilé la teneur sur ce blog et qui montrent que les pays les plus éloignés de leur juste part sont la Russie, le Japon, les Etats-Unis, l’Union européenne, etc... et non pas les pays du Sud – notamment la Chine et l’Inde – souvent pointés du doigt. (...)

En demandant explicitement aux pays du Sud de contribuer de manière équivalente que les pays dits « développés » à partir de 2020, les Etats-Unis, soutenus par l’Umbrella Group, essaient de faire imploser les principes sur lesquels sont basés les négociations de l’ONU, mettant en péril un possible accord. Qui plus est alors que la promesse des 100 milliards d’ici à 2020 – qui devraient être publics et additionnels – est loin d’être atteinte. En vingt ans, les pays du Nord ont rechigné à débloquer des financements. Ils souhaitent désormais s’affranchir de cette responsabilité. (...)

les Etats-Unis souhaitent que les principes de la convention cadre des Nations-Unie qui instituent une différenciation entre pays développés et pays en développement soit purement et simplement supprimés à l’occasion de la COP21. (...)

A trop se focaliser sur ce qui est rejeté en bout de cheminée, les négociations de l’ONU oublient qu’il existe une formidable machine à réchauffer la planète, l’économie mondiale, et qu’elle est alimentée par des filières énergétiques clairement identifiées. (...)

Un agenda des solutions discrédité

Malgré des alertes répétées (ici lors de la PreCOP, là via une lettre collective à François Hollande), l’Agenda de l’Action Lima-Paris est pollué par des propositions portées par des champions de la pollution qui n’auraient jamais dues être acceptées. Ainsi en est-il du « Partenariat Pétrole et Gaz sur le Méthane » des industriels fossiles, ou encore des propositions ayant trait au 4/1000 et à l’agriculture climato-intelligente. (...)

C’est un peu comme si un groupe de marcheurs se trouvaient sur un sentier conduisant vers un précipice, que les GPS signalent l’erreur de parcours depuis longtemps, mais qu’aucun des marcheurs ne se décide à stopper le groupe pour changer de direction. C’est donc à la société civile d’obtenir la bifurcation - en octobre 2015 nous disions avoir un "urgent besoin d’un ouragan citoyen pour renverser la table des négociations". A l’intérieur des négociations – ce n’est pas parti pour et on n’ose plus y croire – comme à l’extérieur. Sinon, qui d’autres le fera à notre place ?