
Le passage à l’ère du numérique semble bien avoir changé la façon dont les femmes et les filles sont impactées par les violences sexistes, et les affaires de cyber-harcèlement récentes défraient la chronique. La journaliste Nadia Daam a fait l’objet d’un cyber-harcèlement abject, ordurier suite à une de ses chroniques humoristiques, certains utilisateurs du site Jeuxvideo.com n’ont pas hésité à la menacer de viol, ainsi que sa fille (1). La militante féministe, Floriane Marandet (2) a également été victime de harcèlement de la part d’utilisateurs de ce site, elle a été menacée de mort, calomniée, les harceleurs ont aussi usé de divers moyens pour la discréditer professionnellement. Ce qui relie ces deux affaires c’est la prise de position féministe de ces deux jeunes femmes, Nadia Daam a ouvertement critiqué les adeptes de jeuxvideo.com, et Floriane Marandet milite activement, sous sa véritable identité. Ces deux femmes au féminisme assumé, exposées dans les médias ou les réseaux sociaux se sont exprimées de façon explicite, et quand elles ont pointé des comportements sexistes et violents, la réaction des concernés a été de redoubler de violence, en ligne, voire dans la réalité, afin de les faire taire. (...)
(...) Un peu comme les muselières utilisées pour faire taire les soit-disant commères au moyen-âge (3), les violences en ligne ont la capacité de réduire au silence les femmes à la parole un peu trop libre. Persistance du but, changement de stratégie, les nouveaux masculinistes recourent aux méthodes de leur temps pour faire taire les insolentes. (...).
Ce qui ressort de cette courte revue de littérature, c’est que les femmes et les filles, bien que plus lourdement impactée en termes de santé mentale que les hommes, sont agissantes dans le cyber-harcèlement et reprennent les codes de la domination masculine pour exercer des violences psychologiques entre elles. Ce qui est aussi à retenir, c’est qu’internet n’est pas étanche, des contenus partagés en ligne peuvent avoir une incidence sur le réel, déclencher des comportements agressifs, violents, sexistes dans la vie des usagers. Au-delà des classiques conseils de prudence en ligne que délivrent les institutions et autres organismes de prévention, ce constat appelle un changement culturel chez les femmes, la nécessité d’établir une culture de la solidarité féminine et le refus de la reproduction de la violence masculine à l’intérieur des groupes de femmes. C’est le problème majeur qui ressort de cet état des lieux des connaissances scientifiques : loin d’être solidaires, les femmes sont actives dans le cyber-harcèlement, surtout chez les plus jeunes, et vont en quelque sorte, après avoir internalisé la misogynie, exercer des comportements violents et misogynes sur d’autres femmes, et cela demande réflexion, comment créer une véritable culture de la solidarité chez les femmes ? De refus de la violence masculine ? Le débat est ouvert. (...)
Un peu comme les muselières utilisées pour faire taire les soit-disant commères au moyen-âge (3), les violences en ligne ont la capacité de réduire au silence les femmes à la parole un peu trop libre. Persistance du but, changement de stratégie, les nouveaux masculinistes recourent aux méthodes de leur temps pour faire taire les insolentes.