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Le Monde
Frontex, la chute d’une « affaire française »
Article mis en ligne le 7 mai 2022

D’après une note du ministère de l’intérieur, récupérée par « Le Monde » et le média collaboratif « Lighthouse Reports », un rapport accuse le directeur de Frontex, le Français Fabrice Leggeri, d’avoir « fermé les yeux » sur des refoulements illégaux de migrants en mer Egée, de s’être entendu avec les autorités grecques pour fournir une version concordante à la Commission européenne et d’avoir « commis un parjure » devant le Parlement européen.

Dans les couloirs du Parlement européen, à Strasbourg, Fabrice Leggeri est venu prendre un café, mercredi 4 mai. Certains croient savoir qu’il se trouvait dans la région pour des raisons personnelles, lui qui est natif de Mulhouse (Haut-Rhin). Celui qui a dirigé l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, Frontex, jusqu’au 29 avril aurait saisi l’occasion pour échanger avec des eurodéputés, notamment les anciens ministres de Nicolas Sarkozy, Nadine Morano et Brice Hortefeux (Les Républicains), mais aussi le porte-parole de Reconquête ! et transfuge du Rassemblement national (RN), Nicolas Bay. Des figures parmi celles qui l’ont publiquement soutenu depuis qu’il a été poussé à la démission, après sept ans à la tête de la plus riche agence européenne. (...)

Tous reprennent à leur compte la défense de M. Leggeri, détaillée dans un courrier adressé à ses équipes, le 29 avril (...)

Un récit qui heurte certains observateurs. « M. Leggeri présente les choses comme une espèce de lutte philosophique sur le rôle de l’agence et on peut difficilement l’entendre », estime une source gouvernementale française. « A Frontex, on ne peut choisir entre les droits fondamentaux et la protection des frontières », affirme, de son côté, Anna Garphult, représentante suédoise au conseil d’administration de l’agence. (...)

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Migrants : Fabrice Leggeri, patron contesté de Frontex, démissionne
Figure de l’imperméabilité des frontières européennes, régulièrement accusé de tolérer des refoulements illégaux de migrants, le patron français de Frontex Fabrice Leggeri a présenté sa démission, a annoncé vendredi l’agence européenne de gardes-côtes et de gardes-frontières.

Le conseil d’administration de Frontex a fait cette annonce après une réunion de deux jours faisant suite "à l’enquête de l’Olaf, l’Office européen de lutte antifraude, contre trois de ses membres dont le directeur exécutif". (...)

Directeur exécutif de Frontex depuis 2015, Fabrice Leggeri a été visé par un rapport non public début 2022 de l’Olaf qui, selon l’hebdomadaire français Le Point, lui reproche de "ne pas avoir respecté les procédures, s’être démontré déloyal vis-à-vis de l’Union européenne et un mauvais management personnel".

Mais cette enquête intervient sur fond d’accusations régulières, notamment de la part d’ONG, de pratiques de refoulements illégaux de migrants (dits "pushbacks") et de complaisance envers les autorités grecques, par exemple, sur des renvois brutaux vers la Turquie.

Mercredi encore, une enquête publiée par le quotidien français Le Monde et le site d’investigation Lighthouse Reports a démontré qu’entre mars 2020 et septembre 2021, Frontex a répertorié des renvois illégaux de migrants, parvenus dans les eaux grecques, comme de simples "opérations de prévention au départ, menées dans les eaux turques". (...)

au-delà du rapport de l’Olaf, il semble que la philosophie et la nature même de la mission de l’agence sont au coeur du rapport de force qui a poussé Fabrice Leggeri à la démission : Frontex doit-elle assurer avant tout l’imperméabilité des frontières extérieures de l’Europe ? Ou bien doit-elle surveiller les Etats membres de l’UE dans la protection des demandeurs d’asile qui frappent à leur porte ?

Ces derniers mois, le directeur exécutif de Frontex s’interrogeait publiquement sur ce dilemme. Début décembre, lors d’une table ronde, il s’était même dit "démuni" face à cette situation. "On est schizophrènes", avait-il lâché. (...)

Vendredi, une porte-parole de la Commission européenne, Anitta Hipper, a ainsi tranché la question : "Le rôle de Frontex, d’une importance cruciale, est d’aider les Etats membres à protéger les frontières extérieures communes de l’UE et de faire respecter, dans le même temps, les droits fondamentaux. Pour cela, Frontex doit être dotée d’une agence stable qui fonctionne bien". (...)