
Malgré ses espoirs, presque rien dans l’ordre du monde ne va dans le sens voulu par Macron. Explication
Ses débuts furent si prometteurs qu’on était en droit de s’attendre à une nouvelle donne pour la France. Après tout, au milieu des ruines du multilatéralisme subsistaient de beaux restes ; il existait un chemin étroit, dont Emmanuel Macron pouvait devenir l’éclaireur sur la scène mondiale. La carte méritait d’être jouée et le dynamique président a su, un temps, laisser penser qu’il pouvait écarter les murs. Or en plusieurs circonstances, et le G20 de Buenos Aires en est une nouvelle démonstration, il est apparu évident que l’espace de respiration s’était refermé.
L’Amérique a repris la main sur le rythme du monde
A deux reprises, à la tribune des Nations unies, Macron a pris la parole après le "maverick" américain pour chasser les miasmes de l’unilatéralisme tonitruant et défendre sa propre voie, la seule qui laisse encore une petite place à son pays, et à l’Europe. Las, après avoir joué la carte de la complicité compétitive avec Donald Trump et tenu la dragée haute à Vladimir Poutine, Emmanuel Macron doit déchanter. (...)
Dans cette nouvelle phase qu’il affronte bien seul, il se heurte à la dure réalité d’un monde qui a perdu toutes ses illusions en matière de multilatéralisme, tandis que les sirènes des régimes autoritaires rencontrent un écho grandissant. Pire encore, les humeurs changeantes de Donald Trump, ses foucades, ses déclarations contradictoires (face à la Chine, à la Russie, à l’Union européenne, à l’Arabie saoudite...) reviennent à faire dépendre l’ordre du monde d’un seul homme, au profil fantasque, ce qui relativise fortement l’importance des cercles d’experts ou de sherpas, ces grands manitous chargés des communiqués lénifiants à l’issue des rencontres internationales.
Deux éléments échappent à Macron (...)
Tout d’abord, l’Europe, cruellement absente, ou disparate, alors qu’il compte sur elle pour étayer sa stratégie planétaire. Isolée, la France ne peut rien. (...)
Ensuite, Macron ne peut compter sur aucun leader planétaire majeur qui, issu des anciens pays émergents, se montrerait franchement convaincu de l’avenir du multilatéralisme. Il manque objectivement d’appuis dans le reste du monde à l’heure où le Brésil s’en remet à son nouveau président populiste Jair Bolsonaro, où le président turc se révèle définitivement incontrôlable, où le nouveau président du Mexique, Andres Manuel Lopez Obrador n’offre pas de certitudes. (...)
À l’opposé, Macron ne trouve sur sa route que des tenants d’un chacun pour soi qui achève de faire le jeu de l’unilatéralisme. Cela d’autant plus qu’il n’a cessé dans ses discours de cristalliser les deux blocs, progressistes (avec lui-même comme héraut) contre nationalistes (la "lèpre"), laissant ainsi un fossé se creuser. L’erreur est peut-être là ; car presque rien dans l’ordre du monde ne va fondamentalement dans le sens voulu par Macron.