Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
désobéir
GARDÉS À VUE POUR UN JEU DE MOTS : LE RETOUR DU CRIME DE LÈSE-MAJESTÉ ?
Article mis en ligne le 21 novembre 2018

Une bonne nuit en cellule pour trois antipubs pacifistes ce dimanche 11 novembre, 100 ans après l’armistice de 14-18.

Ce 11 novembre au soir donc, des militants anti-publicitaires décident de se réapproprier gentiment l’espace public en posant quelques affiches contre la guerre. Un sujet toujours d’actualité, la France accueillant le même jour une brochette de chefs d’état dans une mascarade fort peu pacifiste.

Des affiches artisanales et caricaturales sur le thème des ventes d’armes, du refus de la guerre ou des derniers faits d’armes de notre cher Président, viennent avantageusement remplacer les publicités, Boulevard du Montparnasse, à Paris.

Il est un peu plus de minuit, et une voiture de police déboule en trombe à nos côtés : « Hop vous là, par ici, pas la peine de s’enfuir », trois moustachus nous demandent nos papiers, saisissent deux affiches sur le point d’être posées et appellent des renforts. (...)

Vérification d’identité sur place et longue attente. Dans ce genre de cas où des affiches publicitaires sont remplacées sans dégradation, il est fréquent que le propriétaire du mobilier urbain rechigne à porter plainte, craignant une mauvaise publicité (et il s’y connaît). Les activistes sont souvent rapidement relâchés… mais pas cette fois. Plus la peine d’espérer attraper le dernier métro.

Le petit chef des moustachus reluque quelques affiches trônant fièrement dans les abribus alentours. Et les décrit à l’officier de police judiciaire à l’autre bout du sans-fil en cette heure tardive.

Ce ne sera pas l’ouverture des panneaux ou le changement des affiches qui justifiera notre interpellation, mais une seule affiche : une caricature de Macron, pour laquelle on nous reprochera un « outrage » au chef de l’état ! Plus exactement « outrage par écrit en réunion à personne dépositaire de l’autorité publique », en l’occurrence le Président.

Tout ça pour un jeu de mots : « Macron Pétain câble » : Macron pète un câble, faisant référence à sa gaffe récente concernant l’ex-maréchal, qu’il avait qualifié de « grand soldat pendant la 1ère guerre mondiale », auquel il « était légitime de rendre hommage » comme aux autres « maréchaux qui ont conduit l’armée à la victoire ». De quoi faire se retourner dans leur tombe les fusillés pour l’exemple de 14-18, comme les déportés de 39-45. (...)

On vide nos poches, on nous prend tous nos objets personnels, nos ceintures et lacets, on nous fait nous déshabiller pour une fouille au corps, et on nous oublie dans une cellule.

Celle-ci fait 3 mètres sur 4, quelques matelas sommaires sur le sol et deux caméras au plafond pour garder un œil sur nous. Derrière les vitres, dans le couloir, une lumière qui ne s’éteint jamais.

Par chance, nous restons tous les trois ensemble. Une bonne chose pour garder un semblant de moral, et surtout pour tromper l’ennui. (...)

On aurait pu, à la limite, nous reprocher des injures publiques. Mais dans notre cas, un jeu de mots pareil n’aurait pas été punissable de prison, donc pas de garde à vue possible.

Reste alors le délit d’ « offense au chef de l’état » ! Mais pas de chance, il n’existe plus depuis 2013, après que le « Casse toi pauv’ con » ait été puni de 30 € avec sursis puis que la cour européenne des droits de l’homme condamne la France pour atteinte à la liberté d’expression. L’OPJ doit-il retourner d’urgence à la fac ou a-t-il sciemment tourné la loi pour nous dissuader de recommencer ?

Une seule solution pour résoudre cette énigme, qu’en pensez-vous : réinventer le « crime de lèse-majesté » !