
Un témoignage, un coup de gueule d’Istanbul, aéroport Atatürk. Une histoire, un Abdou parmi tant d’autres…
Un être humain, perdu parmi des millions de gens qui traversent un aéroport, dont la compagnie aérienne, le personnel médical, et la plupart des passants se foutent royalement. Une vie humaine en question…
Pendant que nous publions son histoire, Abdou est dans l’avion, après une semaine de galère. Et la destination que sa vie prend est incertaine.
Lundi 1er mars 2016
05:30 de retour de mon voyage en Géorgie et en transit à Istanbul, nous prenons le petit déjeuner au fast-food de l’aéroport Ataturk d’Istanbul avec Cyril et Olivier. Fatiguée, je regarde les gens qui fourmillent autour de moi comme il y en a tant dans un aéroport… Assis à la table à côté je remarque un homme qui n’a pas l’air de se sentir bien. Effectivement, rapidement 2 hommes le portent jusqu’aux toilettes.
Je pars me promener 5 minutes. A mon retour, l’homme qui ne se sentait pas bien, (on l’appellera Abdou puisqu’il nous sera familier par la suite), est allongé par terre sur le carrelage, en petit débardeur blanc, tremblant et les yeux dans le vide…. Les 2 hommes qui l’ont amené aux toilettes sont à ses côtés…. Je suis la situation attentivement sans m’y mêler.
Les « médecins » de l’aéroport arrivent, lui prennent le pouls, essayent de lui parler, et très rapidement repartent sans lui apporter aucune aide supplémentaire. J’interpelle une des infirmières en lui disant : « Do you plan to leave this man like this ? He needs help, come on ! » « Vous allez laisser cet homme comme ça ? Allez, il a besoin d’aide ! » Elle me répond « He is drunk », « Il est saoul » et elle s’en va.
Il est clair qu’Abdou n’est pas du tout ivre mais plutôt évanoui, il tremble, il a besoin d’aide. Je m’improvise alors secouriste : je lui prends la main, et ne cesse de lui parler, je tente aussi d’instaurer un code de communication avec lui : « si tu veux dire oui tu me serres la main, si tu veux dire non tu laches ok ? » Dans un premier temps en anglais, puis une dame africaine me dit « Il est togolais, parles lui français ».
Pendant ce temps mes 2 amis Cyril et Olivier tentent d’interpeller la police, les médecins etc… en disant que quelqu’un a besoin d’aide…. Ils sont ignorés !
Mon code de communication commence à fonctionner… je ne cesse de lui parler, et de le rassurer en lui disant qu’il n’est pas tout seul et qu’il n’y a aucun souci, je sens petit à petit qu’il serre ma main et la relache, je suis contente ! Je comprends qu’il a froid, qu’il ne veut plus qu’on lui mette de l’eau sur le front, et qu’il a envie de dormir. Cyril et Olivier arrivent à réquisitionner un fauteuil roulant auprès des gars de la sécurité, on le relève, et on va l’installer sur une banquette pour l’allonger. (...)