
Plus de deux années de censure pour l’encyclopédie en ligne, et finalement un début de résolution. En Turquie, Wikipedia subit les foudres du gouvernement, qui en empêche l’accès aux internautes. La Cour européenne des Droits de l’Homme avait été saisie fin mai, et voici que la Cour constitutionnelle du pays condamne la politique de censure.
Coup de tonnerre à Ankara : ce 26 décembre, la Cour constitutionnelle a considéré que le blocage de Wikipedia constitue une violation de la liberté d’expression. La décision ouvre ainsi la voie à une levée de l’embargo imposée au site, instaurée depuis avril 2007. Au départ, le gouvernement d’Erdogan avait fait valoir, pour justifier son geste, que l’encyclopédie entretenait des liens avec des organisations terroristes. La Wikimedia Foundation, organisation à but non lucratif qui héberge l’encyclopédie, n’avait eu d’autres choix que de se tourner vers le plus haut tribunal turc pour contester ce blocage.
De la sécurité nationale à la liberté d’expression
Partant d’un prétexte, évidemment fallacieux, le chien de garde des télécommunications turques avait évoqué une loi permettant de couper les vannes du net. En effet, les sites considérés comme obscènes ou menaçant la sécurité nationale peuvent être éradiqués sans autre forme de procès. Par le passé, la Turquie avait demandé à Wikipedia de supprimer certains articles, qui entreraient dans ces catégories. Suite au refus net, Ankara déclara que la plateforme s’inscrivait dans une campagne de diffamation contre le pays. Une mesure administrative était alors prise pour censurer le contenu, sans plus de raisons. (...)
Depuis Strasbourg, la CEDH avait statué contre la Turquie, mais le pays préférait alors payer les amendes plutôt que de se soumettre à la décision de la Cour. Elle avait alors donné jusqu’à la fin de l’année 2019 pour apporter des justifications plausibles concernant la censure pratiquée, « non compatible avec l’article 10 de la convention européenne des Droits de l’Homme qui protège la liberté d’expression ».
Désormais, la décision du tribunal a été communiquée aux autorités, qui devront mettre en application le verdict — et rendre l’encyclopédie de nouveau accessible. Et devrait éviter une nouvelle intervention de la CEDH contre le pays. Près de 127.000 sites ont été interdits, ainsi que des dizaines de milliers de pages personnelles, par la Turquie.