
Quatre chercheurs, dont Philippe Ciais, climatologue CEA au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, se sont penchés sur la santé des forêts françaises, fragilisées par les conséquences du changement climatique et par les activités humaines. Verdict : elles se détériorent à grande vitesse et pourraient bien perdre leur capacité à absorber le CO2. Une étude à lire dans un rapport publié par l’Académie des sciences et l’Académie d’agriculture de France, le 7 juin 2023.
Par leurs capacités de stockage et de captation du dioxyde de carbone émis dans l’atmosphère, les forêts sont des alliées contre le changement climatique. Elles recouvrent 31 % du territoire français et absorbent naturellement environ 10 % des émissions annuelles de CO2 du pays. L’utilisation du bois pour remplacer des matériaux comme l’acier et le béton, dont la production émet beaucoup de gaz à effet de serre, est une contribution supplémentaire à l’atténuation du changement climatique. La France a d’ailleurs fait de ses forêts un des piliers de la neutralité carbone qu’elle s’est fixée d’atteindre en 2050.
Et pourtant… ces vastes étendues boisées sont en grand danger, alerte Philippe Ciais, climatologue CEA au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement. Si rien n’est fait, nos forêts pourraient, avant 2030, émettre globalement plus de carbone qu’elles n’en absorbent ! En dix ans, leur absorption de CO2 a déjà été divisée par deux.
Incendies, canicules, exploitation forestière
Comment en est-on arrivé là ? Plusieurs causes, dont certaines accentuées par le changement climatique, sont à l’œuvre :
- Les vastes incendies atteignent désormais de nouvelles régions comme les Landes, la Bretagne ou le Jura. Un phénomène qui pourrait s’aggraver et devenir plus fréquent, dans un monde globalement plus chaud de +2°C, voire de +3°C. En 2022, 5 millions de tonnes de CO2 ont ainsi été relâchées par les forêts, soit 4 fois plus que d’habitude ;
- Les grandes tempêtes, bien que relativement rares, déciment de vastes espaces ;
- Les canicules, sécheresses et la recrudescence de ravageurs fragilisent les arbres, ralentissent leur croissance ou les détruisent ;
- Les coupes de bois se sont intensifiées dans la plupart des régions.
Conséquences : sur la dernière décennie, la croissance des forêts métropolitaines a diminué de 10 % et leur mortalité a augmenté de 54 %, diminuant de fait leur capacité à stocker du carbone (...)
Un plan d’urgence pour les forêts (...)