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« Laissés pour compte » : des éboueurs franciliens surexposés face au Covid-19
Article mis en ligne le 22 mars 2020

A l’heure du confinement et du télétravail, les éboueu.r.se.s restent en activité, sans bénéficier des équipements nécessaires. Face au danger, Dominique, éboueur chez Veolia, et Eduardo, balayeur à la ville de Paris, racontent comment les valeurs du service public sont récupérées par le secteur privé, incitant le personnel à faire son « devoir » sans le protéger ni du virus, ni de la précarité.

E : Je suis éboueur à la ville de Paris, je fais du balayage ou du lavage de chaussée. Moi, je ne travaille plus : je suis placé en autorisation d’absence, on a des mesures restrictives comme le reste de la population. Mais pour les collègues qui sont en collecte d’ordures ménagères ou en débardement de marchés alimentaires, puisque les marchés alimentaires continuent à fonctionner, eux sont en obligation de venir travailler. A mon sens, et de ce que j’ai su grâce à mes collègues avec qui j’ai discuté au téléphone, toutes les mesures de sécurité pour les agents ne sont pas respectées : trois par cabine dans le camion, non équipé.e.s de tenues réglementaires, travaillant comme si de rien n’était, dans le public comme dans le privé. C’est purement scandaleux.D. : On nous a dit de bien nous laver les mains, de rester à un mètre... (...)

C’est un protocole de Parlement : concrètement, on n’a pas de gel, ni de masque, ni de gants. Quand on part sur nos lieux de collecte, on est dans un camion, confiné.e.s à trois dans une cabine. On ne sait pas si on a le coronavirus, on est proches, on ne sait pas et on n’a pas de protection, et ça fait peur, dans le contexte actuel... (...)

je connais très peu de gens qui, après la retraite, sont encore en vie. C’est un métier qui épuise l’être humain. Les charges, le froid, la pluie, ça joue sur les os... Même si ça s’est amélioré, on est obligé de pleurer, de quémander, pour avoir des conditions de travail décentes.J’ai conscience qu’il y a un service à faire, on ne peut pas laisser ça dehors, faire proliférer les microbes. Mais les conditions sont mal faites, j’ai l’impression qu’on est laissé pour compte... (...)

C’est ça qui est regrettable et blasant.

(...) quand vous voyez des riverain.e.s qui vous disent, avant l’appel au confinement : "pourquoi vous ne portez pas de masque, pourquoi vous vous protégez pas ?" et que la seule chose que vous pouvez dire c’est : "pour l’instant, on n’en a pas", ça fait peur.

Si, par malheur, on a un enfant asthmatique, avec un problème grave, ou un parent diabétique, ça ne pardonne pas. (...)

On nous a vraiment mis en condition telles que : "il y a une crise, une pandémie qui est là, c’est à vous d’être les acteurs sur le terrain, à vous de ramasser les déchets quoi qu’il arrive, quoi qu’il en coûte, par contre on n’a pas de masque, pas de moyens, faites votre travail". Grosso modo, c’est ça qui a été dit.