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Le président est hostile à l’idée d’un big bang fiscal, il a tort !
Article mis en ligne le 17 avril 2019
dernière modification le 16 avril 2019

Notre fiscalité est injuste, incohérente, illisible, aléatoire et coûteuse. Elle doit être entièrement repensée. Se limiter au seul impôt sur le revenu (IR), c’est truquer le débat pour l’orienter vers la stigmatisation de ceux, les "assistés", qui recevraient sans contribuer. En réalité, tout le monde paie, y compris les plus déshérités, tout le monde reçoit, y compris les plus favorisés !

Certes l’IR est très lourd pour ceux qui ont la chance d’atteindre ses tranches les plus élevées. Mais il ne représente que 7 % des 1000 milliards de prélèvements obligatoires. Et les 40% de ménages qui ne le paient pas, subissent eux aussi des prélèvements énormes. Si l’on prend le cas d’un célibataire payé au SMIC (1181 € nets) en intégrant les cotisations sociales, la TVA, la taxe d’habita­tion, la redevance TV et la fis­ca­li­té de l’essence, on atteint déjà 49%, s’il a le malheur de fumer et de boire de l’alcool, il dépassera largement les 50% !!!! Selon le site revolutionfiscale.fr (Piketty, Saez, Ecole d’Economie de Paris), en 2010, quand on monte dans l’échelle des revenus, le taux global de pré­lè­ve­ment débute à 40%, il augmen­te ensuite rapidement pour se stabiliser autour de 49%, puis baisse au delà du seuil d’accès au groupe des 5% les plus riches, et passe enfin sous la barre des 35% pour les 0,1% qui gagnent le plus.

Mais il faut tenir compte également des prestations. Et là aussi le débat est truqué : le total des aides sous conditions de res­­sour­ces qui vont surtout aux 20% de français les plus modestes (16 millions de personnes) n’atteint pas 40 milliards, soit le même montant que les niches fiscales au profit des parti­culiers (autant vont aux en­tre­prises) qui sont concentrées sur quelques cen­tai­nes de mil­liers de con­tri­­bua­bles à très haut reve­nu (total des niches plafonné à 1500 euros mensuels en cas d’in­ves­tissement outremer !).

Assistanat en effet ! Mais les assistés ne sont pas uniquement ceux que l’on dit ! (...)

Seul le revenu doit être taxé, il doit l’être en totalité, il doit l’être une seule fois.

Les taux doivent être indépendants du type de revenu du ménage, ou de la forme juridi­que de l’en­tre­prise : proportionnel pour les entreprises, progressif pour les mé­na­ges. Des taux progressifs plus faibles mais appli­qués à la to­talité des revenus rapportent plus, sont mieux acceptés, et sont plus jus­tes, que des taux élevés qui obli­gent à pré­voir une foule d’exonérations pour corri­ger leurs effets per­vers, ce qui favo­rise l’évasion et la fraude.

Pour y parvenir, il faut fusionner les centaines de prélèvements différents qui se cumulent aujour­d’hui dans un fouillis inextricable. (...)

Cependant, on ne pourra éviter certaines exceptions (droits de succession...) et il est impossible de supprimer la TVA.

En effet, elle fait partie des règles de l’UE visant à limiter la concurrence fiscale (taux plan­cher "nor­mal" à 15% et "réduit" à 5%). On devra donc maintenir cette taxe qui repor­te sur les mé­­­na­­ges une part de la con­tri­­bution des entreprises et alourdit la charge des plus bas revenus.

Au total, il s’agirait de supprimer la plupart des prélèvements actuels.

Pourquoi ? Parce que de simples aménage­ments ne suffiront pas à éliminer leurs effets nocifs qui sont majeurs. (...)

Entreprises :

Les cotisations sociales "patronales" sont de très loin la plus forte contribution des entreprises. Elles ont 3 défauts : 1) elles péna­li­sent les entreprises de main d’oeuvre et les poussent à substituer le ca­pi­tal au travail (...)

les énormes exonérations réservées aux bas salaires incitent à sous-ré­mu­­né­rer le travail peu qualifié (...)

Cependant, plus un changement est révolutionnaire, plus sa mise en oeuvre doit être prudente et progressive.

En effet, pour passer à un système plus juste, il faut opérer un transfert massif de la charge de ceux qui sont trop taxés vers ceux qui ne le sont pas assez. Ap­pliquer brutalement une telle réforme pro­vo­querait donc un choc fiscal d’une ampleur gigan­tes­que.

La réforme doit être radicale dans son principe, mais progressive dans son application. (...)

Pour conclure, il faudrait élargir le débat. L’autre volet de notre système, à savoir l’aide aux plus pauvres, pose les mêmes problèmes : elle est inextricable, coûteuse et in­jus­­te. Il est grand temps de supprimer les dizaines de prestations cal­cu­­lées sur des bases, et selon des logiques, différentes et contradictoires, pour les remplacer par une aide unique : un revenu universel qui serait parfaitement à sa place dans le Bonus-Malus. Mais c’est un autre débat.